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épi de seigle
ergoté; le sclérote du
champignon, violet-noirâtre,
rappelle l'ergot du coq, d'où son
nom.
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le "Tau" des Antonins, aux
extrémités
"pattées".
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épi de seigle
ergoté; le sclérote du
champignon, violet-noirâtre,
rappelle l'ergot du coq, d'où son
nom.
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le "Tau" des Antonins, aux
extrémités
"pattées".
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épi de seigle
ergoté; le sclérote du
champignon, violet-noirâtre,
rappelle l'ergot du coq, d'où son
nom.
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Quel est
(peut-être) le point commun entre les
sorcières de Salem (Massachusetts, 1692),
les mystères d'Eleusis dans
l'Antiquité, de nombreux cas de
sorcellerie, certaines visions de saints, les
voix de Jeanne d'Arc et le pain maudit de
Pont-Saint-Esprit (1951)?
Il s'agit d'un
champignon microscopique appelé "ergot de
seigle" (Claviceps Purpurea) qui parasite les
céréales et en remplace les
grains; en temps de disette, les grains
infectés étaient moulus avec les
épis sains, puis consommés avec le
pain; très riche en alcaloïdes
très toxiques (ergotamine,
ergotoxine...), ce champignon occasionnait une
terrible maladie, l'ergotisme, qui a fait des
centaines de milliers de morts à partir
du Moyen-âge et jusqu'au début du
XXème siècle; on l'appelait alors
"Mal des Ardents" ou "Feu de Saint Antoine",
à cause de brûlures ressenties dans
les membres des malades, et en
référence aux tentatives du
démon d'entraîner le Saint en
enfer.
L'ergotisme
revêt deux formes, qui peuvent se
combiner:
- une forme
gangreneuse due aux propriétés
vasoconstrictives du champignon: les
extrémités (mains, pieds), qui ne
sont plus irrigués, noircissent, se
nécrosent et finissent par tomber, dans
d'horribles douleurs; c'est la
gangrène;
- une forme convulsive
car l'ergot est toxique pour le système
nerveux central; d'où des crises
convulsives, dépressives et des
hallucinations, des délires, des troubles
du comportement et de la perception.
Pour guérir de
cette maladie, on invoque Saint Antoine car un
gentilhomme dauphinois aurait obtenu la
guérison de son fils lors d'un
pélerinage auprès de ses reliques;
celui-ci crée une communauté
à la fin du XIème siècle,
qui évolue vers un ordre religieux: les
Antonins (à Saint-Antoine-en-Viennois);
au XVème siècle, ils sont
près de 10 000 moines et ont fondé
plus de 300 abbayes ou commanderies.
On pense qu'à
Moissey, rue du Dieu de Pitié, se
trouvait un Couvent des Antonins; une statue de
Saint Antoine (avec son cochon) se serait
trouvée dans la niche de sa
façade, selon les témoignages des
anciens.
On sait peu de choses
sur les soins prodigués aux malades (les
démembrés) qu'ils soignaient de
façon empirique: ils leur concoctaient un
médicament à base de vin mis en
contact avec les reliques de Saint Antoine et
priaient pour eux .
Les Antonins
demandaient l'aumône et avaient le droit
de faire divaguer leurs cochons dans les rues,
ce qui soulevait beaucoup de
protestations.
Sur leur manteau
à capuchon était cousu le "Tau",
(le signe de l'ordre en forme de T,
désignant une béquille?), en tissu
bleu, sur l'épaule.
Cet ordre est
méconnu car ses archives furent
détruites en 1422 par un incendie, puis
en 1567 par les Huguenots.
L'ordre décline
à partir du XVIIIe siècle car les
épidémies du mal des ardents
régressent. Il est alors réuni
à l'ordre de Saint-Jean de
Jérusalem (plus connu sous le nom d'
Ordre de Malte) en 1777.
Depuis longtemps, on
utilisait l'ergot de seigle en
obstétrique, mais c'est en 1777 que
l'abbé Teissier montre que la poudre de
ce champignon administrée à des
canards et à des porcs leur fait
contracter cette maladie
cryptogamique.
Au XXème
siècle, les chercheurs des laboratoires
Sandoz effectuent de nombreux travaux afin
d'isoler les alcaloïdes, les principes
actifs de l'ergot, pour la pharmacopée;
de nombreux médicaments sont encore
utilisés aujourd'hui, pour l'appareil
circulatoire et en gynécologie
notamment.
En 1938, à
Bâle en Suisse, le chercheur Albert
Hofmann extrait de l'ergot de seigle l'acide
lysergique, un hallucinogène dont il
synthétise des dérivés,
qu'il appelle LSD (initiales allemandes du
diéthylamide de l'acide lysergique). Le
25ème dérivé, LSD-25,
testé sur l'animal puis jugé sans
intérêt sur le plan médical,
est abandonné pendant 5 ans.
En 1943, toujours chez
Sandoz, Hoffman décide de refaire la
synthèse de cette molécule pour en
tester les propriétés de
manière plus approfondie, et il en
absorbe une dose infinitésimale
accidentellement; c'est alors qu'il
connaît une expérience
hallucinatoire intense, une ivresse puissante:
«Lorsque je fermai les yeux, je vis
défiler une série d'images
fantastiques coupées d'un
kaléidoscope de couleurs d'une
vivacité extraordinaire. Cet état
se prolongea pendant trois heures
environ.»
Il venait
d'expérimenter le plus puissant des
hallucinogènes connus.
Le LSD venait d'entrer
dans l'histoire, après avoir agi dans
l'anonymat pendant des
siècles...
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