Un Enterrement à
Ornans
A nous deux,
Paris !
Pièce en un
tableau de Patrice Ducordeaux, enrichi des textes de
Flora Mercier (avec Noémie )
Mise en place du
tableau et scénographie
Musique
d'entrée : O Fortuna des Carmina Burana (Carl
Orff)
Gustave Courbet
lui-même va inviter le public à se
rassembler près de lui et devant le grand rideau
noir pour retrouver ses amis d'Ornans, qu'il a peints
dans son atelier dès 1849 pour la
réalisation de son tableau, Un Enterrement
à Ornans. Ils se présentent, arrivant par
moitié de chaque côté du tableau.
Dans le public, vagabonde Noémie, vieille
ornanaise qui a bien connu Courbet dès son jeune
âge, et l'interpelle régulièrement,
prenant à témoin tour à tour les
figurants ou le public.
Voix off (Musique La Force
du Destin VERDI)
Nous sommes en 1919. Le
corps de Courbet est rapatrié en France, soit un
siècle après sa naissance.
Transféré depuis le cimetière de la
Tour du Peilz (Suisse) où il était
décédé le 31 décembre 1877,
Courbet va ainsi « renaître »
en respirant à nouveau le sol natal. Retrouver son
village natal, Ornans, la Loue, les vallées, les
arbres, la nature qui l'ont inspiré une grande
partie de sa vie. Plus de quarante ans après, le
village n'a pas encore oublié les écarts
artistiques du peintre, son engagement, même
éphémère, dans la Commune et ses
positions anticléricales comme ses tableaux
provocateurs. Mais il respire Gustave Courbet. Tant
d'attentes, tant d'injustice, tant de haine envers un
artiste qui a pourtant toujours prôné la
paix des peuples, le refus de la guerre et la
défense des humbles et son désir permanent
d'ouvrir l'Art au peuple. En 1919, un an à peine
après la fin de la grande Guerre, il va porter un
regard effaré sur ce qui vient de se passer dans
le monde. Il avait connu l'enfer en 1871, il
découvre que les hommes sont restés les
mêmes, qu'ils croient plus facilement au canon qu'
à la fraternité, plus à
l'affrontement qu'au dialogue.
Il se retrouve à
nouveau projeté 70 ans en arrière,
l'année où il commence une toile qui va
devenir un de ses chefs-d'uvre, l'Enterrement
à Ornans. Très critiqué au Salon, il
n'aura alors de cesse de prendre sa revanche, de
provoquer et bousculer les Ecoles traditionnelles. Cette
renaissance va lui donner l'occasion d' entraîner
ses amis dans cette incroyable aventure : rendre le
tableau vivant et reconquérir
Paris.
Courbet arrive du
fond du public se présente dans la tenue de son
Autoportait à Sainte
Pélagie.
G C : Putain de bordel,
mais
par quel miracle ?? Où
sommes-nous ? Ornans, ses falaises, la Loue, la
Franche-Comté. Mais c'est un monde que j'aime.
J'ai senti la campagne, entendu les journaliers,
respiré les champs, admiré les bois. Et
puis, je me souviens de cette Franche-Comté, j'ai
parcouru Besançon, Dole
.
Un spectateur : Oui,
monsieur Courbet, on se souvient de vous ici.
G C : Chers amis, vous
êtes là vous aussi ? Comme le temps fut
long de cette séparation avec vous. Enfin
réunis ! A nouveau, après cet exil et
cette pénible période parisienne, ce
piège, je dis bien ce piège et non pas ce
siège de 1871 qui fut terrible. Cet hiver de
cochon que même le Haut Doubs n'aurait pas
supporté ! Comme vous m'avez manqué
durant ce temps terrible de l'exil à La tour de
Peilz. Bien sûr, les amis de Suisse m'ont recueilli
mais je n'ai jamais cessé de penser à vous,
à Ornans, à la France.
Noémie : Ben dis
donc y'en a bien du monde,
.. ça passe,
ça passe
On peut pas croire c'qu'on
devient !
G C : 1919 vous
dites ? Alors, je suis mort depuis plus de 40
ans.
Un spectateur : Pour un
mort, vous vous portez encore assez
bien !
Noémie :
Tiens ! Mais on dirait la Célestine, hum,
avec son homme elle n'a pas eu tous les mystères
joyeux, c'est pour ça qu'elle boîte tant,
elle a bien eu du courage de se traîner jusque
là ! Et l'Hippolyte Proudhon, aussi
là, avec la visote qu'il a, pas étonnant
qui peut se pisser dessus.
C'est bien malheureux tout
ça, mais c'est comme ça, ma foi, j'en
reviens pas qui soient tous venus. Celui qui nous aurait
dit tout ça, on lui aurait dit q' c'était
un menteur.
G C : Je n'étais
pas préparé à tant de soubresauts de
la vie, à tant de rancur d'ennemis que je ne
soupçonnais pas. Je ne voulais faire que du bien,
rendre la culture au peuple et offrir ma peinture et mon
art aux plus humbles, la rendre populaire en peignant la
vie tout simplement. Paris m'a accueilli c'est
vrai ! J'ai fréquenté les plus grands
artistes, de Baudelaire à Manet, de Zola à
Cézanne, Rimbaud, Degas, Bizet, Daumier, Monet.
Mais Paris m'a trahi, m'a rejeté ! Nom de
Dieu de salaud !
Noémie - Qu 'est c'tu
veux ! Ça s'en croit les Parigots, il a bien
des maux c't homme !
G C : Même en fuyant
Paris en ce mois de mai 1872, je pensais revoir et
ressentir cette atmosphère, ces rencontres qui
furent autant de plaisirs. Ah ! Le plaisir, nom de
Dieu, quel beau mot et comme il faut bien en jouir.
Pasteur, un autre gars de chez nous qui a fait son
chemin, a bien dit qu'Enthousiasme était le plus
beau mot de la langue française, moi je dis
PLAISIR !
Noémie : Du
plaisir
..on avait beau faire, y fallait trimer
jusqu'à point d'heure, la Jeanne Groslambert, elle
faisait ses six kilomètres tous les matins pour
aller traire à la Baraque et elle repartait pour
mener les vaches, elle en a eu des maux.
G C : J'ai voulu faire un
art vivant, à l'usage du peuple. Un mot qui fait
peur : PEUPLE. Voilà que la truandaille, que
ce monsieur Thiers appelait la vile multitude,
reçoit les honneurs de la grande toile. Le
voilà le peuple, les gens d'Ornans. Ils sont ce
qu'ils sont, de vrais gens que j'ai peints parce que je
les voyais ainsi. Et vous, messieurs les chroniqueurs
mondains, critiques foireux ou pious-pious serviles, que
reprochez vous à ce brave fossoyeur ?
Approche Antoine !
Antoine Cassard,
le fossoyeur, (17) s'approche
On aura tout entendu !
Le fossoyeur : Bonjour
monsieur Courbet. C'est vrai, les Parisiens ont
raillé ma face de brute, ha oui je m'en
souviens ! Un fossoyeur au milieu d'un tableau,
pensez donc !
G C : On a tout entendu
vous disais-je ! L'affreuse chose, les laides gens,
et quel peuple. Le National a même écrit que
de mes qualités, j'avais fait des
défauts, une sorte de sauvagerie toute crue. Plus
de 70 articles de journaux parisiens m'ont taillé
en pièces pour avoir peint ces figures
triviales, bêtes, plates, d'une vulgarité
pour la plupart au-dessous de la brute.
G C : Venez, venez tous,
approchez. (Les personnages, disséminés
dans le public, commencent à se manifester et se
rapprochent de G C)
Arrivée
de Jean Antoine Oudot, grand-père. (1)
G C : Mon
grand-père est là, un Oudot, vigneron, qui
admira Voltaire, et qui bouffa du curé. Il a
participé à la naissance des
républiques. Il avait 21 ans le 14 juillet
89 !
Le grand-père :
Bonjour Gustave ! 14 juillet, ha ça oui,
c'est une belle date. La République, la
République ! Moi qui fut Sans-Culotte,
patriote, vous n'en ferez jamais autant que nous et cette
République là, avec le freluquet de
Bonaparte le troisième, vous ne l'avez pas
conservée longtemps.
G C : De 1848 à
1852 ! 4 ans, avant qu'un Empire ne s'installe avec
le Badinguet. Jusqu'à sa déculottée
à Sedan en 1870.
Le grand-père : Il
nous aura quand même emmerdés presque 20
ans. J'aurais voulu être là, pour
sûr en 1870 à Paris !
Noémie : Autant
tirer le buffet par la clé,
S'approchent
ensuite Donalie (31) lingère, suivie de Reine
(37) femme de vigneron
Noémie : Tiens,
c'est'y pas la Donalie avec la Reine ? A 17 ans la
Donalie qu'elle a eu son premier gnard :
Félix qui s'appelle, celui là, je peux vous
dire qu'il n'a pas été bercé trop
près du mur.
Donalie et Reine : Bonjour
monsieur Courbet. On vient avec vous, en
vrai !
G C : (avisant
l'énormité du cadre) Il a fallu
être enragé pour travailler dans les
conditions de ce minuscule atelier. Je m'en souviens. Je
travaillais à l'aveuglotte. Une toile de 20 pieds
de longueur sur 10 de hauteur. Il y a de quoi crever.
Arrivée
de Max Buchon, ami d'enfance (6) avec Jeanne (29)
lingère
Jeanne : Bonjour monsieur
Courbet
G C: Salut ma Jeanne. Tiens
t'es avec Max. Max Buchon, mon ami, que je connais depuis
le petit séminaire d'Ornans. Depuis, on a connu
d'autres lieux, d'autres rencontres et les mêmes
ennemis. T'es devenu écrivain,
pamphlétaire, rebelle, t'es bien dans la
lignée des Proudhon et Fourier, toi !
Max : Hé oui, je
fais partie des quarante-huitards. Et la police de Salins
ne m'a jamais aimé. Les princes non plus
d'ailleurs et c'est la Suisse, comme toi, qui m'a
accueilli.
G C : La Suisse, oui. J'y
ai conservé quelques amis mais bon dieu, quelle
était belle la montagne, qu'il était bleu
ce lac. Tu as vu mon coucher de soleil sur le
Léman ?
Max : Bien sûr.
Certains y ont vu les signes de l'Impressionnisme. Tu as
vu ce que sont devenus Manet, Renoir, Monet, Van
Gogh ?
G C : Ils ont eu du
succès ? Tant mieux, ils ont inventé
une peinture d'homme libre. Allez Max, on a tant de
choses à se raconter, tant de choses à
rattraper, on ne va pas se priver.
Max : Gustave, on va
à Paris pour toi. Tu es le meilleur et ils vont te
redécouvrir.
G C : Merci mon ami.
Aïe, je vois la
mère Gagey qui s'approche. Qu'est ce qu'elle
voulait me mettre après l'exposition de ce
tableau. Elle n'avait pas apprécié qu'on
dise que les gens d'Ornans étaient laids. On
envisagea même de mettre Ornus dans le titre,
à la place !
Max : Je me souviens de
cette polémique
. mais je te laisse à
la mère Gagey.
La mère
Gagey (40), journalière, avec
Thérèse (39) femme
d'artisan
La mère Gagey :
Bonjour monsieur Courbet. C'est de l'histoire ancienne
tout ça. Chuis contente de r'venir dans vot'
tableau maintenant. Et on va leur montrer qu'on est bien
vivants.
G C : Et toi, Urbain
(19) ? Mon compagnon de toujours, compagnon
d'absinthe et de cabaret. Quel lieu interdit n'avons nous
pas fréquenté, dis ! Hé, tu es
avec Alphonse (4)
Arrivent
ensemble Urbain Cuénot (19) ami d'enfance, et
Alphonse Promayet, (4) musicien
Noémie: Les deux
là, y z'avaient la meilleur eauvotte et la plus
bonne eau de cerise du coin, j'te dis pas le jour ou le
garde est venu quand y distillaient avec monsieur le
curé, eh ben l'Urbain, t aurais vu comme il te l'a
embobiné, si bien qu'après, not garde y
s'émeillait devant les litrons, fictivement, il a
vidé à boire jusqu'à plus, et quand
il est reparti il l'avait pas le gosier égrali ,
et pis y s'est jamais souvenu qu'il était v'nu et
il est d'ailleurs jamais r'venu.
Urbain et
Alphonse s'approchent avec une pinte de bière,
en offrent une à Gustave. Ils s'installent
à une table et ils trinquent à leurs
retrouvailles)
Urbain Cuénot :
Bonjour Gustave. Et à ta santé
retrouvée !
Alphonse : On se revoit
tout de suite après et devant trois
charmantes !
G C : Comptez sur moi, je
n'ai jamais manqué ce type de rendez-vous. (il
boit une grande gorgée) Bordel, ça fait
sacrément du bien dans les écoutilles
!
Après un
temps, s'essuyant la bouche du revers de la
manche
J'ai bien été
obligé d'inviter mes voisins dans mon atelier.
Chacun voulant autant que l'autre, en être et ne
voyant aucune raison que l'un y soit et pas l'autre. Ils
montaient l'escalier de la maison, ils s'installaient et
je peignais, un à un. Fallait les voir faire les
fiers dans la rue. Tenez
.prenez donc le Guillaume
et la Félicité.
S'approchent
Guillaume Bertin (21) gendarme, et
Félicité Colard (44),
propriétaire aisée
Guillaume Bertin (21) et
Félicité Colard (44) Bonjour
monsieur Courbet. On s'met dans le tableau
aussi.
Noémie : Dis la
Félicité, tu t'rapelles quand t'es
allée aux Vêpres et q'tes cochons t'avaient
suivi sans bruit !
G C : Bonjour les amis,
entrez dans le grand théâtre du peuple
d'Ornans.
Entrent Pierre
Clément (14), cordonnier et Françoise
Garmont (30) fille de propriétaire
cultivateur
Pierre Clément :
Bonjour monsieur Courbet, vraiment ravi de vous
rencontrer.
Françoise Garmont :
Bonjour monsieur Courbet
G C : Mon
grand-père n'aimait pas la calotte, c'est
sûr. Mais je n'ai pas pu m'empêcher de
m'inviter à la table du clergé. Allons,
l'abbé, sans rancune et mes offenses m'auront
porté en exil.
Le curé
Bonnet (12), s'approche, suivi de Claude Journet et
François Panier dit Fifi Panier (9 et 10)
GC : J'ai eu avec vous
dans l'Atelier, des conversations morales et
philosophiques désopilantes !
Le curé : Votre
tableau
. Le Retour de la Conférence en a
remué plus d'un au presbytère. Le pape
lui-même s'en serait étranglé !
(Il se signe)
G C : Et alors,
c'était pas vrai ce que je
peignais ?
Noémie : Cqu'y dit pas
aussi Monsieur le curé, mais qu'y s'rappelle bien
et qu 'à remué le presbytère aussi,
c'est quand les p'tiots avec le Claude et l'Alphonse et
le Guillaume et les autres étaient allés
cueillir les fleurs des champs pour la procession de la
fête Dieu dans le jardin de la mère Bon, et
y nous avait dit d'aller nous excuser et demander pardon
à la propriétaire, et quand on a voulu
toquer, personne ne voulait.
- vas-y-toi
- non toi!
Et puis le plus petit le
François s'est dévoué, il a
toqué il avait à peine dis -madame- qu'il a
reçu une de ces taloches, le brave poulot, et
pendant c'temps tous les autres y avaient
détalé.
Fifi Panier : Bonjour
monsieur Gustave. C'est y vrai que vous avez fait de la
prison ?
Claude Journet : Et
même tué des prussiens ?
G C : Ho les gosses,
gardez vous de colporter de telles sottises. La prison
oui, mais pour que tu puisses vivre un peu plus libre,
p'tit Claude. Et à Paris, j'ai vu des gosses comme
toi, Fifi, tomber sur les barricades, comme
toi !
Le curé
salue et houspille les enfants de chur en train
de jouer à la courotte autour de ses jupes. Il
va se mettre en place, avec les enfants de chur
Arrivent Zoé (24)
et Juliette (35), surs de
Gustave
G C : Mes chères
surs, Zoé (24), Juliette (35). Les muses de
mes débuts. Toi Zoé, qui t'es tant
occupée de moi quand je croupissais à
Sainte Pélagie. Et toi Juliette, qui m'assistera
sans relâche jusqu'à ma mort.
Juliette : Gustave, tu
n'as pas toujours été sage et nous a
causé du tourment. Mais tu as tant donné
à l'art, à Ornans et la
Franche-Comté. J'aurais voulu faire plus et te
ramener en France plus tôt. La France ne le
souhaitait pas.
G C : Et pourquoi, bon
dieu ! Je suis mort à 58 ans et j'ai toujours
vécu libre et je crois que dans l'histoire, il
sera rare de trouver un homme dans ma position, qui
après avoir travaillé toute sa vie, pour
tâcher d'établir le bien et les arts dans
son pays, ait été persécuté
d'une façon aussi épouvantable.
Zoé : On le sait
tous Gustave, mais reconnaît que tu as un peu
cherché les ennuis.
G C : Sans doute, mais il
faut savoir bouger les choses et suivre sa
voie
Entrent
Eugénie (43), Claude Sage(16) et Alphonse
Bon(3) qui saluent Gustave avec un bonjour monsieur
Courbet
Courbet se
retire
On va
évoquer la Commune et à cet instant, un
chant de la Commune est interprété,
créant la césure dans le scénario
ou environ la moitié des personnages est en
place.
Musique : Madame
Butterfly de PUCCINI (Extrait La Callas)
Voix
off :
Durant la période de
la Commune, Gustave Courbet est nommé
président de la Commission des Musées et
délégué aux Beaux Arts. Il propose
le déboulonnement de la Colonne Vendôme, qui
évoque les guerres napoléoniennes. La
Commune décide le 13 avril, d'abattre et non de
déboulonner, la colonne. Après la Semaine
Sanglante, au cours de laquelle les Versaillais se sont
livrés à d'horribles mesures de
répression envers les communards, Courbet est
arrêté le 7 juin 1871, et le 3e conseil de
guerre le condamne à 6 mois de prison et 500
francs d'amende. En mai 1873, le nouveau président
de la République, Mac Mahon, décide de
faire reconstruire la Colonne Vendôme aux frais de
Courbet, soit pus de 300.000 francs.
Interprétation
du chant de Ferrat
Courbet
revient
Entrent sa
mère Sylvie (46) et sa sur Zélie
(38) avec la petite Teste (47)
G C : Ma mère et ma
sur Zélie
Sylvie Oudot : Bonjour
Gustave. Mais tu es tout pâlichon. Tu es
malade ?
Zélie : Bonjour
Gustave, maître-peintre, maître-râleur,
maître-parleur, maître-emmerdeur
Sylvie Oudot : Oh !
Zélie !!
G C : Putain de
Colonne ! Je ne demandais pas qu'on cassât la
colonne Vendôme. Je voulais qu'on l'enlevât
de la rue dite de la Paix, ce bloc de canons fondu qui
perpétue la tradition de la conquête de
pillage et de meurtre.
(s'adressant à sa
mère) J'ai été mis à la
muraille pour y être fusillé,
traîné dans les rues de Paris, la
chaîne aux mains, couché à plat
ventre dans trois centimètres de vermine à
l'Orangerie. Car la viande et la bière furent
rares dans les geôles de Thiers ! Et ce Mac Mahon
et son parti de l'Ordre Moral, des sots et des fossoyeurs
à la rancune tenace.
Noémie : Ça
mène où les rêves, hein, vain nom,
c'est pas possible c'qu'on devient, déjà
qu'un homme c'est rien, mais avec les autres qui
l'asticotaient; not Courbet y l'était moins que
zéro, les sales vioces, les peutes vioces, c'est
pas de gloire qui peignait not' Gustave, je vous l'dis
les gens connus y sont comme les bufs du Valdahon,
le meilleur ne vaut pas l'autre.
G C : Ma très
chère mère ! Sans nouvelles, loin de
cette Révolution, tu as cru au pire, et tu en es
morte. Je suis revenu à Ornans, en mai 1872, tu
n'y étais plus. Je n'ai jamais pu t'expliquer ce
qui avait conduit mon action et mes actes. On a voulu me
salir et me faire passer pour un jeanfoutre, un
mécréant. Tu es là ma mère.
Je peux te le crier, je n'ai pas failli et j'ai
appliqué les préceptes de ton père,
mon grand-père : Marche droit, la tête
haute !
(Ils s'enlacent
longuement puis la mère
s'efface)
S'avancent Hippolyte
Proudhon (22 ) juge de paix et Jean-Baptiste Cardey
(25), vigneron
Jean-Baptiste Cardey :
Bonjour monsieur Courbet
Hippolyte Proudhon (22) :
Monsieur Courbet, vous avez eu maille avec la justice et
moi, substitut du juge de Paix, pourrait vous en faire
grief. Merci d'être revenu nous voir, vous nous
avez manqué. J'aurais voulu vous défendre
à Paris au procès de la colonne. Car ce
Lachaud
un avocat qui cherchait avant tout la
gloire et une fortune sur votre dos
G C : Lachaud, un
salopard, oui ! Il a bien profité du
procès.
Hippolyte Proudhon. Vous portez
un nom qui m'est cher, monsieur le juge de Paix.
Proudhon ! Il m'a longtemps servi de guide, et sa
pensée m'a souvent inspirée. Je l'ai peint.
J'ai cru à sa conception d'un travail
libéré, d'une activité
créatrice libre, pour que l'art et le travail
puissent être assimilés. Oui, Proudhon, tu
pensais que l'homme est travailleur, c'est à dire
créateur et poète. Je crois qu'on en
parlera encore longtemps.
Noémie : mon
premier amoureux y s'appelait aussi Hippolyte, Hippolyte
Pourchet, et un jour qu'on avait mêlé pour
jouer aux tatos y s'est mis en tête de grailler
sous les racines des saules pour y trouver des grabeuses
et on s'est mis à gavouiller et volà que je
m'étale dans la gadoue et comme j'avais pas de
pantalon y voit ma fente et y me dit :
- c'est par là que tu
pisses!
- j'suis pas une poule, je fais
pas tout par le même trou!
- t'as pas de zizi
?
- mais si c'est ça mon
zizi
- ben tu dois t'en mettre plein
partout!
- bécile,
j'écarte les cuisses
- fais voir
- alors là, je t'envoie
un de ces jets, pire que la source de la Peuce en
Octobre
- tu pisses dru, mais moi je
pisse plus loin que toi quand même!
Ah ! Mon Hippo, faut toujours
qu'il ait le dernier mot, d'ailleurs c'est tout comme
aujourd'hui encore.
Arrive lentement
François Pillot-Secrétan (26) dit le
père Secrétan
G C : Le père
Secrétan ! Un vieux de 93. Tu l'as
aimée ta République, père
Secrétan. Elle a défendu les petits
paysans. Dis donc, tu portes le bicorne bien
fier !
F Pillot-Secretan :
(26) : Le petit Gustave a bien grandi, oui
.bien grandi. J'aurais bien voulu en être
moi, de la Commune. Pour sûr, les Prussiens, on les
aimait pas.
G C : Thiers les a
aimés, lui ! Je me souviens de la nouvelle et
de la colère des Parisiens quand ils apprirent la
capitulation à Versailles. 28 janvier 1871 !
La honte et l'abandon. Et Paris qui se soulève et
la Garde Nationale qui rejoint les Parisiens ! Et
Ornans aussi a bien résisté m'a-t-on
raconté ?
(Mouvements
d'approbation du public, entraîné par
Noémie)
Arrivée de
Célestine Garmont (27) la boîteuse
célibataire et Jean-Baptiste Muselier (15)
vigneron
G C : Ma pauvre
Célestine, moi, j'ai été
emmerdé toute ma vie par mon cul en croûte
et son chapelet d'hémorroïdes. Toi tu l'auras
traînée cette patte folle et tu aurais bien
mérité un bon mari. Ça aurait pu
être le Jean-Baptiste, avec ses vignes,
c'était du bon parti ! Et toi Jean-Baptiste,
comme tu es beau !
Jean-Baptiste Muselier :
C'est pas ce qu'ont dit les Parisiens, pourtant, en
1850 !
G C : Que n'a-t-on
raillé ton pif rouge comme une cerise et ta trogne
pantagruélique.
Célestine : Bonjour
monsieur Courbet. Dites moi, la prison vous a
changé !
G C : Oui, tu vois !
Résultat de six mois de prison. Ce qu'il y a de
terrible dans la chute d'un homme, c'est qu'on ne sait
jamais quand ça va s'arrêter. On s'accroche,
on sort la tête de l'eau, on se remplit les poumons
et on recoule ! Et quand on est dans le malheur,
loin de tout, personne n'ose plus s'occuper de vous. Tous
les hommes de France que je connaissais, où
étaient-ils ? Personne ne bougeait et
tremblait comme une feuille.
Mouvements de
foule, rumeurs, chuchotements. Quelqu'un s'approche de
Courbet. On reconnaît Victor Hugo. Une haie
finit par se former autour du grand homme dont la
popularité était
immense.
L'échange entre
les deux hommes est enregistré en voix off.
Tous les acteurs se figent durant ce
dialogue.
V Hugo : Gustave Courbet
est parmi vous ?
G C : Je suis là,
monsieur Hugo. Très, très honoré de
vous accueillir
V Hugo : Voilà
l'Homme par qui naquit le scandale ! Quelle audace,
mais quel prix à payer !
G C : Nous avons un point
en commun, l'exil. Vous à Guernesey, moi en
Suisse.
V Hugo : Vous souvenez
vous de votre déclaration sur les Etats Unis
d'Europe à l'Athénée en octobre
70 ? « Le devoir commun est donc d'abolir
les frontières et partant, les armées, afin
d'établir les Etats Unis d'Europe »
G C : Oui, c'était
votre vu depuis longtemps
V Hugo : Le hasard de
l'histoire a voulu que je pénètre à
Paris le 18 mars, jour de l'insurrection. Je menais mon
fils Charles au père Lachaise, mais je
désapprouvais déjà la
méthode. On n'entre pas en guerre civile sous les
yeux de l'ennemi victorieux. La Commune fut une bonne
chose mal faite. Mauvais choix du moment, mauvais choix
des hommes.
G C : Votre influence fut
immense dans la période qui suivit. Et on
n'oubliera pas l'accueil fait aux fuyards dans votre
maison.
Noémie: C'est pas rien
tout ça, c'est pas rien, quel bazar la vie, j'me
dis que c'est comme la chanson du rouge
Poulot
Arrivée
de Claude Promayet, professeur de musique (13) avec
Louisette (33) femme de vigneron
Louisette : Bonjour
monsieur Courbet
Claude Promayet : Mais il
y avait Jules Simon, Jules Ferry et Jules Grévy,
un pays pourtant pour te défendre!
G C Salut mon
Claude!
Ferry, Grévy, Simon ?
Bernique, je les ai appelés à l'aide, leur
ai rappelé leur devoir de soutien d'un ami,
franc-comtois, comme eux. Ils allaient me sortir de ce
foutoir de merde ! Fallait il que je sois à
ce point un danger pour eux et leur carrière
politique ! Quand tu es dans le camp des vaincus,
les vainqueurs se foutent pas mal de toi. Vallès
n'a pas été si con, lui. A Londres !
Il m'avait prévenu que les choses tournaient mal
« La cage s'ouvre, envoles toi bien haut, mais
méfie toi des chasseurs,
communard » Et Pissarro et Monet, à
Londres aussi. Zola à Marseille, Sisley
envolé lui aussi ! Moi je suis
resté.
Noémie : Sur dix lapins
t'en as toujours neuf pour corner au cul
Jules Grévy :
Allons monsieur Courbet, un peu de calme ! En cette
période très troublée, il
était difficile d'agir.
G C : Monsieur le
président Grévy. Car vous avez fini par
être élu et même réélu.
Président de l'Assemblée Nationale en 1872,
vous auriez pu me soutenir lors de l'affaire de la
colonne Vendôme. Vous, le républicain
convaincu.
Jules Grévy :
J'étais contre la Commune bien que nous partagions
certaines valeurs, de paix, de solidarité et de
démocratie. Avec Gambetta et Thiers, nous nous
sommes opposés à la Déclaration de
guerre à l'Allemagne en 1870.
G C : Sans doute mais
ça ne m'a pas sorti de la vermine et de la fange
de Sainte Pélagie. Vous avez réalisé
de belles nobles choses ensuite. Allons, Pays, serre moi
la main ! Et va saluer tes compatriotes
francs-comtois. Ils te sont gré de se que tu as
accompli pour le peuple.
G C : Mais, Claude, tu
étais bien dans l'Après-Dînée.
Ce tableau, bon sang, tu y étais aussi Adolphe,
dans l'Après-Dînée ?
Entrent Adolphe Marlet (20),
avocat, accompagné de Joséphine Bauquin
(28) propriétaire moyenne
Adolphe : Bonjour Gustave
(ils s'enlacent) C'était en 1849 ce beau tableau,
un an avant que tu ne commences cet
Enterrement.
Joséphine Bauquin :
Bonjour monsieur Courbet
G C : 1849, Belle
année ! 8 uvres au salon, une
médaille d'or et le triomphe à Ornans pour
l'enfant du pays. N'est-ce- pas monsieur le
maire ?
Entrent Prosper
Teste, le maire (24) suivi de Françoise Roncet,
femme d'ébéniste (32)
Prosper Teste : Le
triomphe oui, et quelle fête. Le vin blanc des
vignerons ornanais a coulé frais., Bonjour
Gustave
Noémie : Et ça
tétait sec , j'vous dis pas comme ça
piquait des larmes
G C : Pas la même
musique après la Commune. J'voudrais pas remuer le
linge sale, mais à part quelques amis
fidèles, à Ornans, on a eu vite fait de me
foutre au caniveau.
Prosper Teste : On m'a
enterré 3 ans avant, en 1868.
G C : Et bien moi,
j'aurais voulu être là, à Ornans,
pour faire la peau à ces salopards qui
étaient allés se servir dans mon atelier,
après les Prussiens. Et mon Pêcheur de
Chavots, que j'avais offert au village et qui
trônait fièrement sur la place ? Qui
c'est qui l'a foutu par terre ?
Noémie : Moi,
j'aurais bien une idée ? Mais on va pas
faire se battre tous les gens qui s'retrouvent
après 70 ans !
Arrivée
de Jeanne Etevenon, (41) dite Fifi Caillot,
ouvrière en robes
Fifi Caillot (41) : dites
monsieur Courbet, c'est vrai qu'on monte à
Paris ?
G C : Tiens, Fifi Caillot,
à la bonne heure ! Mais bien sûr qu'on
monte à Paris ma fille, on va leur montrer aux
parisiens qu'ils avaient bien tort de nous refuser. Ils
ne voulaient pas de nous en 1859, ils nous verront au
Grand Palais.
S'avance
François Colard-Chaulamne, le porte-croix (11),
vigneron
GC : Approche,
François !
On est en 1919, et on a
séparé les laïcs et les curés
depuis 20 ans. Mais on va encore se mélanger, car
on est du même pays. Porte bien haut ton Christ,
va ! S'il pouvait rassembler les hommes et la paix.
Mais rien n'a changé, tu as vu le carnage entre 14
et 18 ? C'est à se taper les roustes sur les
pavés. Va, François, porte le ton
étendard, mais j'y crois
guère !
F Colard-Claudamne :
Bonjour monsieur Courbet. Vous savez, les hommes finiront
sans doute par devenir raisonnables.
Entrée de
Jean-François Crevot (2) artisan cordonnier et
Suzanne (34 femme d'artisan
G C : Hé le
cordonnier, Jean-François Crevot. Voilà un
homme qui aurait fait bonne figure à Paris. Tu
sais, tu en aurais eu des chaussures à remettre
d'aplomb dans l'hiver 1871 !
J F Crevot : Bonjour
monsieur Courbet, content de vous revoir. Je suis venu
avec Suzanne, ma payse.
Suzanne : Bonjour monsieur
Courbet
G C : Une payse, j'ai
jamais réussi à en accrocher une à
Ornans mais les parisiennes qui sont venues dans ma
couche m'ont appris bien des choses ! Je te
raconterai mes nuits avec Jo, ma belle irlandaise, et mes
tripatouillages avec Adèle, qui a fini pas en
avoir marre d'un gars qui savait pas aimer. Mes femmes,
ce sont mes tableaux désormais. Ma
maîtresse, ma peinture.
Suzanne : Justement,
à propos de Jo, on a retrouvé son portrait
que vous avez peint en 1866
G C : Non, ne me dites pas
que
.
Suzanne : Non, pas
l'Origine du Monde, l'autre
avec la tête,
quoi !
A ce moment, on
ferme le rideau afin que les personnages commencent
à se mettre en place.
Musique : Le
Trouvère (Verdi) 1'30''
Gustave revient
par le côté, accompagné de Louis
Pasteur
Pasteur : Monsieur
Courbet, ravi de vous connaître. Nous avons
traversé les mêmes belles vallées
sans nous rencontrer.
G C : Monsieur Louis
Pasteur, quel bonheur effectivement. Votre
activité et vos voyages ne l'ont pas permis. Je
vous ai tant admiré
Pasteur : Et moi vos
tableaux ! Vous y êtes allés fort quand
même avec votre Origine du Monde ! Savez vous
que nous avons des choses en commun ? A part notre
amour pour le pays franc-comtois ?
G C : Non, pas
vraiment ?
Pasteur : Notre
caractère entier. Vous avez refusé la
Légion d'Honneur, ce qui provoqua un beau
scandale ! Moi, j'ai renvoyé mon
diplôme de la Faculté de Bonn après
l'invasion et le siège parisien des prussiens.
J'étais à Strasbourg lors de la
déclaration de guerre, j'ai voulu prendre rang
dans un bataillon de la Garde Nationale jusqu'à ce
qu'on me rappelle q'un homme paralysé est un
invalide !
G C : Mes amis vous
attendent.
Entrent
Jean-François Cauchye, cordonnier, le
sacristain (7) avec Alexandre (8) petit
vigneron
J F Cauchye : Bonjour
monsieur Courbet, vous reconnaissez
Alexandre ?
Alexandre : Bonjour
monsieur Courbet
G C :
Décidément, je me rappelais plus que
j'avais invité tout le diocèse dans mon
atelier. Mais ce tableau, après tout, c'est une
cathédrale. La cathédrale du
maître-peintre Courbet, remplie d'Esmeraldas et de
Quasimodos. Entrez monsieur Cauchye, la messe va
commencer !
Entrent Jeanne
Sevré, femme de Claude Promayet (42) et Etienne
Nodier, propriétaire cultivateur (5) et Tony
Marlet, ami d'enfance (23)
Tony Marlet : Bonjour
Gustave, mon frère Adolphe est
là ?
G C : Oui, tu le trouveras
en bonne compagnie.
Jeanne : Bonjour monsieur
Courbet, comment vous portez-vous ?
G C : Tiens, nos gens de
Salins. Je me porte à merveille, chers amis. Je
crois que le départ est proche, montez dans notre
convoi et rejoignez nos gens d'Ornans. Vous n'avez pas vu
mon père ?
Jeanne : Je pense l'avoir
aperçu, il avait rajeuni de 20 ans quand il a
appris votre retour !
Etienne Nodier : J'ai
amené quelques fines et de notre vin blanc
d'Ornans.
G C : Va servir nos amis
qui attendent.
Noémie : Tout pique son
père celui-là.
Entrées
de Régis Courbet, père de Gustave (17)
et Victorine, journalière (45)
Régis Courbet : Je
ne peux y croire ! Tu ne fais
décidément jamais les choses comme les
autres, Gustave !
Victorine : Bonjour
monsieur Courbet. Pour un Enterrement, ça va
êt' joyeux !
G C : Père, quelle
joie. Rappelle toi, notre dernière rencontre
à Bon Port en Suisse, j'étais mal en point
déjà en cette année 1877. Tu te
doutais de la fin.
Régis : Oui, quand
je t'ai vu j'ai compris. Je me rappelais alors ma visite
à Paris, dans la prison de Sainte Pélagie
où je croyais ne jamais te revoir. J'en ai eu gros
sur le cur, quand tu es mort, de ne pouvoir te
ramener à Flagey et te mettre au repos près
du moulin.
G C : Tu m'avais
gardé la place. Tu vois, les hommes sont bizarres.
Ils craignent même les morts. Allez, on y retourne
à Paris et bien vivants.
Voix off : (Extrait de
l'hommage de Jules Vallès)
Après tout, ne le
plaignons pas ! Il a eu la vie plus belle que ceux
qui sentent, dès la jeunesse et jusqu'à la
mort, l'odeur des ministères, le moisi des
commandes. Il a traversé les grands courants, il a
plongé dans l'océan des foules, il a
entendu battre comme des coups de canon, le cur
d'un peuple, et il a fini en pleine nature, au milieu des
arbres, en respirant les parfums qui avaient
enivré sa jeunesse. Il dut fuir de son pays, non
par la loi, mais la peur, la haine et la bêtise.
Alors, cet Enterrement à Ornans, quel beau cadeau
fait à l'Art, quel pied de nez aux conventions et
aux lécheurs de tableaux. Merci monsieur
Courbet !
Noémie: C'est pas rien
tout ça, c'est pas rien!
Musique : Carmina
Burana, O Fortuna (2.44 mn)
Le rideau se
lève progressivement et apparaît le
tableau.
Les figurants restent
immobiles environ une minute, puis lancent ensemble
à l'adresse de Courbet :
Bonjour monsieur Courbet,
à nous Paris !
Puis, un air
lointain se fait entendre, s'approchant jusqu'à
devenir audible et reconnaissable.
G C : Ecoutez,
écoutez bien ! On dirait
oui, c'est
ça, c'est bien ça ? C'est le Temps des
Cerises. Oui, c'est ça, vous vous rappelez ?
(il fredonne doucement et la voix va
s'amplifiant)
Les figurants
s'approchent peu à peu et commencent à
accompagner Courbet jusqu'à ce que le chant se
structure. A cet instant, Courbet va inviter le public
à chanter cette chanson de Jean-Baptiste
Clément, symbole de la Commune.
Après
« Une plaie ouverte » dans la
dernière strophe, les comédiens
s'écartent de Courbet et ce sont les membres de
sa famille qui viennent à ses
côtés (grand-père, père,
mère, surs, petite Teste)
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Le
Temps des
Cerises
Quand
nous chanterons le temps des
cerises
Le gai
rossignol et merle moqueur
Seront
tous en fête...
Les
belles auront la folie en
tête
Et les
amoureux du soleil au coeur
Quand
nous chanterons le temps des
cerises
Sifflera
bien mieux le merle moqueur
Mais il
est bien court le temps des
cerises
Où
l'on s'en va deux cueillir en
rêvant
Des
pendants d'oreille...
Cerises
d'amour aux robes pareilles
Tombant
sur la feuille en gouttes de sang
Mais il
est bien court le temps des
cerises
Pendants
de corail qu'on cueille en
rêvant
Quand
vous en serez au temps des
cerises
Si vous
avez peur des chagrins d'amour
Evitez
les belles..
Moi qui
ne crains pas les peines cruelles
Je ne
vivrai point sans souffrir un
jour
Quand
vous en serez au temps des
cerises
Vous
aurez aussi vos peines d'amour
J'aimerai
toujours le temps des cerises
C'est
de ce temps là que je
garde au cur
Une
plaie ouverte...
Et Dame
Fortune, en m'étant
offerte
Ne
pourra jamais fermer ma douleur
J'aimerai
toujours le temps des cerises
Et le
souvenir que je garde au coeur
[chanson
de Jean-Baptiste Clément,
symbole de la
Commune]
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Salut des
comédiens
Rideau
final
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