Gaston SIMONIN
Mort pour la France
15 août 1913- 16 juin
1940
Mon oncle Gaston Louis naît à Moissey
d'un père maçon et d'une mère au
foyer le 15 août 1913.
Il est le fils de Victor SIMONIN né le 5
novembre 1879 à Moissey
décédé en 1954, et de sa
mère Fernande Pitot Belin née le 27
juillet 1887 décédée à
Moissey en 1968.
Il y a six enfants dans la famille. Il
était le deuxième fils de la
lignée.
André le premier fils naît en 1911,
Georges en 1915, Yvonne en 1920, Fernand en 1923,
et Lucienne en 1925.
Il a passé son enfance dans le plus vieux
secteur de Moissey «appellé le fort
Griffon» situé en bas du village. Rien
à voir avec un fort, ce quartier est un
«lieu dit» où tous les enfants de
Moissey ont couru autour de ce vieux pâté
de maison.
La maison est déjà habitée
par mon ancêtre Claude SIMONIN vers
1730-1740.
Ses premières années, Gaston les
passe à l'école communale avec
C'est un homme qui est prédisposé
pour faire des études et passe son CEP à
13 ans. Il suit des cours complémentaires que
lui enseigne son instituteur car les jeunes gens qui
présentent des possibilités aux
études peuvent faire des cours
supplémentaires.
Mais les revenus des parents sont modestes et il
décide de partir travailler dès
l'âge de 14 ans.
Passionné de moto, il passe son permis en
1936. Pour ses deux garçons, Victor
achète une moto 350cc aux chromes rutilants de
marque Koehler-Escoiffier sous marque de
Monet-Goyon.
Construite à quelques exemplaires par les
deux mécaniciens Koehler et Escoiffier le
réservoir est chromé ainsi que d'autres
parties et le changement de vitesses se fait avec un
sélecteur au pied et non pas sur le
réservoir comme toutes les autres motos.
Bernard Grebot se rappelle d'une
anecdote :
«Sur cette moto d'un beau bleu marine
André SIMONIN fait le tour de la place de
Moissey, mais mon père freinant brutalement
bute le nez dans le guidon ce qui fait rire les
conscrits et les copains du village».
Gaston et André ont grandi ensemble en
promiscuité, en étant très
complices car seulement trois ans les
séparaient.
Ma tante Lucienne se souvient également de
ce frère gentil qui était proche
d'elle.
A cette époque Moissey a 2 fêtes
annuelles et il y a un 3 cafés, le café
Ardin, le café Grebot et le café de
Julie Guillaume.
Au village, au café de M. Arsène
Ardin près de la fontaine, il y a un piano
mécanique.
Avec 20 centimes de l'époque l'on peut
écouter les chansons du moment.
Les jeunes se réunissaient
régulièrement aux cafés et tous
les copains de Gaston, Marcel Thomas,Virgile
Ruisseaux, Serge Sigonnet formaient une
équipe.
Bernard Grebot qui était enfant se souvient
des chansons que chantaient ces joyeux garçons
dans le café pas très large et tout en
longueur de son pére.
Ces jeunes chantaient la Madelon, et toutes
les chansons du moment,
«La guinguette a fermé ses volets, Le
plus beau tango du monde etc... »
Ils dégustaient de la langouste en
boîte en buvant le vin du pays de Moissey, le
fameux «Baco ou Noah».
Tous ces jeunes gens se retrouvaient à la
laiterie qui était Rue Basse et faisaient
beaucoup de bruit en riant ce qui créait de
l'animation dans le village.
Ils attendaient qu'arrive le «tacot ce petit
train qui allait de Dole à Pesmes» et ils
chantaient « il est coc
. le chef de
gare sur l'air de «Il était un petit
navire».
Une douce ambiance régnait.
Gaston est un jeune homme svelte avec les cheveux
châtains légèrement frisés
et les jeunes filles n'étaient pas insensibles
à son charme. Il travaille dès 1927 dans
l'entreprise de son père Victor puis quelques
temps à la carrière de Moissey.
En 1933, il effectue son service militaire dans le
4ème régiment d'artillerie, il a 20 ans.
Vers 1934, il passe le concours pour rentrer à
la SNCF et commence sa carrière à
Mouchard et part ensuite habiter à
l'Isle-sur-le-Doubs, où il rencontrera sa
fiancée.
En 1939, la guerre est déclarée et
pour la mobilisation il est affecté au 28 RAD
EM 3ème groupe secteur postal 13.839 pour
prendre part à la 2ème guerre mondiale
contre l'Allemagne du 2 septembre 1939 au 25 juin
1940.
Commencée le 13 mai dans les Ardennes, la
bataille de France sera la période la plus
difficile pour les soldats Français en cette
année1940.
Pendant tout le mois de Juin, le commandement
Français est complètement
débordé avec des manques de
stratégies, et les pauvres soldats combattent
dans la pagaille en face d'allemands
déterminés.
Cette période sera appelée «la
débâcle».
Gaston fera son devoir contre l'ennemi pas
très loin de Sully-sur-Loire à
côté de son copain Marcel Saget de
Pointre.
L'armée française fera sauter le
pont suspendu le 18 juin pour couper la retraite aux
«boches».
Il sera très gravement blessé
près de Pithiviers, vers le village de
Guigneville ou Greneville en Beauce (lieu exact
inconnu) dans le département du Loiret, canton
d'Outarville, arrondissement d'Orléans, le 16
juin dans l'après-midi vers 15 heures.
PS : par décret en avril 1939
Grigneville s'est appellé Greneville en
Beauce.
Dans la confusion, le blessé est
dirigé sur Melun alors que la ville
d'Orléans est plus proche.
Il décédera à l'hôpital
de Melun le 16 juin quelques jours avant l'armistice
qui sera signé à Rethondes le 22 juin
1940.
Un copain aumônier sera proche de lui
jusqu'à la fin.
Il décrira dans une très longue
lettre, l'agonie de ce garçon qui sera
courageux dans la souffrance.
La dernière lettre de Gaston envoyée
aux proches est datée du 14 juin.
Depuis Londres, le 18 juin 1940, le
Général de Gaulle lance son appel
à combattre l'Allemagne après la
capitulation Française. .
La famille sera très marquée par ce
décès et mon père André
à un énorme chagrin.
Il sera marqué toute sa vie, la cicatrice
ne guérira jamais.
A l'âge de comprendre vers 8-9 ans, je pose
des questions à mon père qui me
décrira mon oncle comme un homme gentil et
aimant la vie, mais ce sujet était
difficilement abordé.
Il était fiancé à une jolie
jeune fille se prénommant Adèle qui
était coiffeuse à l'Isle-sur-le-Doubs,
village situé près de
Baume-les-Dames.
L'armistice a été signé en
juin 1940, mais la guerre va continuer et 22 enfants
du pays seront tués avant la libération
de 1944.
Mon grand père Victor et mon grand
père Paul Bécanier dès le mois de
juin 1940 vont tout faire pour entreprendre des
recherches et avoir des nouvelles car dans ces temps
difficiles peu d'informations remontent aux familles.
Pendant deux années pas de nouvelles.
Des lettres à la croix rouge et au ministre
seront envoyées, et mes grands parents
arriveront à connaître quelques
renseignements complémentaires seulement
après deux ans.
Ma tante Lucienne et mon père ainsi qu'une
autre parente Marie de Paris, se rendront en train au
cimetière de Melun en juin 1942 pendant
l'occupation.
La tombe est entretenue par la mère d'un
jeune soldat qui fut tué dont le corps est
inhumé à côté de mon
oncle.
Gaston recevra la croix des combattants et la
croix de guerre à titre posthume.
Son corps sera rapatrié dans son village de
Moissey en 1948, le curé André Paget
fera un long discours qu'il lira en présence de
la famille, du maire et des habitants du village avant
son inhumation dans le cimetière où se
trouvent aujourd'hui toutes les sépultures de
la famille SIMONIN.
NB : les faits et anecdotes qui sont
décrits ci-dessus émanent des
récits de mes proches ou des amis qui ont connu
ou côtoyé Gaston, ainsi qu'aux documents
d'archives que j'ai pu recueillir.
Merci à tous pour ces témoignages
des années antérieures.
Pierre SIMONIN Janvier 2012
|