château
de Moissey
Origine et description
Au IXe siècle, selon la tradition
locale, un ouvrage fortifié existait
déjà à l'emplacement du
château actuel.
En effet, un ancien propriétaire
effectuant des travaux en 1865 aurait
découvert une pierre de cheminée
portant la date de 830.
Aucun élément ne
permet de confirmer ce dire.
En revanche, selon Rousset, dans son
dictionnaire des communes de
Franche-Comté, un Etienne Boujon, Sire de
Moissey, apparaît dans des actes
franc-comtois en 1318.
Il apparaît donc raisonnable d'estimer
qu'un édifice important existait
déjà à Moissey à
cette époque.
Pourquoi ne pas penser qu'il s'agissait bien
du château actuel, tout au moins de son
plan d'ensemble comprenant les fossés,
les tours, la porterie ?
Retenons donc, sans preuve,
l'origine du château de Moissey à
partir des années 1200.
Au XVIe, Gollut, historien comtois, le cite
comme étant une des meilleures places
fortes de la région.
En 1636, au moment du terrible siège
de Dole, Boyvin (président du parlement
de Dole) écrit ceci:
"Le chasteau, foible et en
assiette commandée de tous
côtés, fut livré par les
paysans au Prince de Condé sans aucune
résistance".
La première description
détaillée du château et de
ses dépendances se trouve dans le texte
de "la reconnaissance faitte au Seigneur de
Moissey par les habitants du dit lieu, en datte
du 29 décembre 1699".
"Ascavoir le chasteau et la
maison forte du dit Moissey où il se
voit quatre tours aux quatre coins d'iceluy
bien couvertes de thuilles consistant en
grand corps de maison, les galleries autour
avec deux ponts-levis à
l'entrée du chasteau. Les
fossés étant alentour dudit
chasteau sont à fond de cuve,
s'abreuvant de plusieurs
fontaines...".
En 1856, Rousset dit:
"il se cache au fond d'une
vallée dominée de tous
côtés par des hauteurs et n'a
qu'une échappée qui plonge sur
les plaines de Bourgogne. Il se compose d'un
bâtiment d'habitation flanqué de
deux tours circulaires, de deux ailes
à double portique se terminant par
deux autres toures circulaires, d'une tour
octogonale ayant servi de chapelle et prison,
appuyée contre l'aile orientale, d'une
cour bordée par l'ensemble de ces
constructions et d'une enceinte de larges et
profonds fossés".
En 1913, selon la description d'Edmond
Guinchard, instituteur à Moissey, les
fossés sont comblés en
partie.
La tour Nord-Ouest est
déjà démolie.
Quelques
événements
La première construction est bien
antérieure à l'usage des armes
à feu.
La situation, en contre-bas des collines
avoisinantes, ne constituait pas un handicap.
Elle assurait au contraire une excellente
protection, grâce aux profonds
fossés remplis d'eau. Ils interdisaient
toute progression à des hommes
revêtus d'équipements lourds et
porteurs d'armes encombrantes efficaces
seulement à très courte
distance.
Sa situation permettait de surveiller
l'itinéraire de Dole à
Montmirey-le-Château et Pesmes.
En 1479, Chaumont d'Ambroise, aux ordres des
Louis XI, dévasta le comté
appartenant alors à l'Empire Autrichien.
Il ruina le village de Moissey, et son
château, ainsi que la ville de Dole. Les
pierres sculptées retrouvées dans
les déblais des fossés laissaient
supposer l'existence d'un somptueuse
construction.
Après sa restauration, il fut
certainement assiégé à
plusieurs reprises et partiellement
détruit, comme arbois et Fontaine
française en 1592 par les troupes du roi
de France Henri IV, commandées par le
terrible Tremblecourt.
En 1636, Louis XIII, sous l'influence
de la politique d'expansion de son ministre
Richelieu, entreprend une nouvelle invasion de
la Franche-Comté alors dépendante
de la couronne d'Espagne.
Dole est assiégée par des
effectifs nombreux: 20 000 hommes à pied
et 8 000 chevaux.
Le château de Moissey devait
être excellent puisque le Prince de
Condé, qui commande les troupes
françaises, quittant le camp d'Auxonne
pour aller diriger le siège de Dole y
séjourne à compter du 27 mai
1636.
Selon les écrits de
Boyvin, "le château fut livré
sans résistance aux troupes de
Condé sous les assurances d'un
favorable traitement".
Ce qui n'empêcha pas le
Prince de Condé, quittant Moissey
"où il trouva force vivres et
munitions, qu'il utilisa contre nous" de
piller et incendier village et
château.
En 1638, reprise des hostilités
autour de Moissey avec la troisième
campagne de Longueville, commandant l'une des
trois armées envoyées en
Franche-Comté par la France.
Le 1er août, Longueville s'empare des
châteaux de Chevigny et de Moissey, le 3
août, de la ville de Pesmes. Il investit
les châteaux de Balançon et
d'Ougney.
La paix de Westphalie en 1648, le
traité du 1er avril 1949, enfin la paix
des Pyrénées signées le 10
décembre 1659 ramenèrent le calme
dans la région.
Pas pour longtemps.
Louis XIV ne renonce pas à
s'emparer de la province.
Il lance une nouvelle opération en
février 1668, commandée par un
autre Condé, fils du
précédent, qui conquiert la
Franche-Comté. Louis XIV la restitue
à l'Espagne par le traité d'Aix la
Chapelle.
En janvier 1674, c'est la conquête
définitive et l'annexion de la
Comté à la France. Les combats
durent être rudes: Dole fut prise
après 11 jours de canonnade.
Nous ne possédons pas de document sur
le sort de Moissey à cette
époque.
Etat actuel
Le château actuel, inscrit à
l'inventaire complémentaire des monuments
historiques, présente beaucoup
d'analogies avec la description de 1699.
La tour Nord-Ouest
[celle qui est absente de toutes cartes
postales anciennes] a été
rasée en 1865, et ses
matériaux ont été
utilisés pour ériger une cuverie
dans le fossé Nord, accessible par le
chemin descendant des vignes alentour.
Cette tour a été
rétablie, dans la moitié de sa
hauteur en 1963, par le Dr Paul Preney.
La destruction des ruines de la cuverie a
permis la restauration du fossé.
Quant à la tour
Sud-Ouest, minée parles infiltrations de
pluie et par le gel, elle s'est effondrée
en 1963 et fut également
remontée à mi-hauteur en 1963 (par
le Dr Paul Preney).
Le double "pont-levis", cité dans la
Charte de 1699, désignait probablement un
ensemble constitué par un pont charretier
et une passerelle piétonnière. Il
a été remplacé par une
arche maçonnée. Les arches
suivantes, restaurées, conservent les
mesures exactes du pont dormant d'origine.
Les arcades de la cour, en "anses de panier"
sont construites selon une technique
répandue dans l'empire de
Charle-Quint.
On peut voir les mêmes au Palais
Granvelle à Besançon, au
château Wawel de Cracovie, ainsi qu'en
Espagne à Tolède.
[Les documents reproduits
ici montrent l'évolution de la
bâtisse de 1961 à aujourd'hui
-1999-. Elle est passée tout
près de la ruine. D'autres
châteaux de l'époque
médiévale ne sont plus,
hélas, qu'à l'état de
vestiges comme ceux de Balançon ou
d'Ougney par exemple.
Certains plus heureux, semblent
renaître, tel est le cas du
château de Chevigny.
Ils constituent une part importante du
patrimoine architectural de la Province et
sont les témoins passionnants de
l'histoire de la
Franche-Comté].
Rédaction de
Claude Preney, fils du Docteur Paul Preney qui
fut le restaurateur de la bâtisse depuis
1961,
avec des extraits des
publications suivantes:
- Rousset: le dictionnaire des communes de
Franche-Comté,
- Camille Guinchard: monographie de Moissey,
ré-édition en 1958 de l'ouvrage de
1913 de son père Edmond Guinchard,
- Jean Rousseau: présentation en 1987
de "J'étais au siège de
Dole",
- Gérard Louis: "La guerre de dix
ans" 1998.
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