Ceux qui n' ont pas
choisi d'aller voir "Comédie française",
dans la salle de cinéma polyvalente d'un
collège dolois, mais qui ont patienté
jusqu'au 29 mai 2010 pour se rendre, non pas au caveau
mais au château de Moissey, auront fait, sans le
savoir, une excellente affaire. Encore n'est-il pas
certain que certains ne l'aient pas
prémédité...
"Comédie
française" est un étonnant et ravissant
transport de Molière dans notre siècle,
avec une mise en scène qu'il n'aurait
sûrement pas reniée, mais qui n'était
pas venue à l'idée de ceux qui s'usent la
santé à monter Molière sans jamais
l' épousseter.
[Attention,
bien distinguer le spectacle de Chantal
"comédie française" de la
vénérable institution
"Comédie-Française" avec majuscules et
tiret, née en 1680. Enfin, bien distinguer, pas
forcément].
Chantal Mairet et les
filles-et-fils de sa paroisse, les Zurbains, nous ont
monté et montré une heure
époustouflante empruntée au siècle
de Louis Quatorze. Il s'agissait de puiser dans l'oeuvre
de Molière Cinq scènes de caricature
(à y bien regarder, des caricatures dans l'oeuvre
poqueline, il n'y a que de ça), sans enlever un
poil ni un cheveu au texte original.
Pour ceux qui par accident
d'agenda ont raté l'événement dans
le château de Susan Borova -le Château de
Moissey- nous racontons un tout petit coup. Un coup
bref.
L'Introït, ou
l'entrée, nous montre le vivier de
comédien-diennes de Molière,
habillés en inattenduS mais en hautes couleurS,
qui s'agitent fébrilement en attendant le
Maître. Lorsque le Maître arrive, il
s'emploie d'abord à mettre de l'ordre dans ce qui
évoque à coup sûr un syndicat de
volailles échervelées.
Le premier tableau est un
extrait de "l'Impromptu de Versailles", le second et le
troisième sortent des "Femmes Savantes", le
quatrième des "Précieuses Ridicules" et le
dernier de "la Comtesse d'Escarbagnas", le tout de
Jean-Baptiste Poquelin dit Molière.
Il y aurait beaucoup à
dire pour qui voudrait témoigner de cette affaire
orchestrée dans ses moindres détails,
l'espace comme il est occupé par les personnages,
les tons, les piaillements, les gémissements, les
mimiques, sans oublier les accoutrements qui
méritent à eux seuls une mention
particulière, une mise en scène
rythmée, méticuleuse, novatrice et
féconde, qui bouscule un public dans l'ensemble
innocent, qui tient plusse de la chorégraphie que
de la misenscène théâtrale telle que
chacun la connaît.
On était non pas dans la
cour du château, mais sur la terrasse du parc
(côté jardin), dans la verdure, avec des
éclairages qui jouaient avec la nuit qui nous
glissait dessus avec sa gentille lenteur. Des
incantations tenues secrètes ont contraint la
pluie à ne se lâcher qu'une fois le salut
accompli.
Pour ceux qui sont
passés à côté,
il ne leur reste plus qu'une
représentation à La
Barre*, mais ça ne
pourra pas être mieux.
Il faut remercier, en plus de la réalisatrice, et
leur modestie dût-elle en souffrir,
- les Dix-Sept
Zurbains qui ont donné toutes leurs tripes,
comme toujours, mais encore mieux que les autres fois,
- le Claude qui à
l'électricité n'a pas fait une fausse
lumière,
- la châtelaine Susan
qui a accueilli -encore- la troupe après le
spectacle avec à manger des trucs d'une recette
inconnue,
- la Marie-Noëlle qui a
nourri tout le poulailler entre l'installation et la
représentation,
- enfin le Foyer Rural
grâce à qui les Zurbains peuvent jouer
à Moissey.
Madame Mairet et les Zurbains nous avaient
déjà sortis de nos coquilles
avec
-
"Théâtre aux Jardins" une
déambulation au village (et au château)
en juin 2007,
- "Cabaret Furieux" au
caveau, en juin 2008,
- "Des Gars des Filles" au
caveau en mai 2009,
- aujourd'hui, c'est
Molière (aux jardins du château) pour
ceux qui ne l'avaient pas lu...
On ne sait pas à quelle
sauce le public sera "mangé" l'année
prochaine...
Mais si le temps
passe, la confiance demeure.
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