Franc-Comtois, Pierre
Lefranc vient au monde le 26 novembre 1815 dans un petit
village du Jura, Montmirey-la-ville. En 1846, il a donc
31 ans. Issu d'un milieu modeste, composé de
petits propriétaires terriens et d'hommes de loi,
il est le quatrième enfant d'une famille qui
devait en compter six.
De la prime enfance de Pierre
Lefranc, nous ne savons que bien peu de choses. Ses
études sont incomplètes. Il ne
fréquente aucun collège et c'est le
curé du village qui éveille chez lui le
goût des études. Adolescent, c'est son
frère Victor, séminariste, qui lui enseigne
les langues classiques. Plus tard, on dira de Pierre
Lefranc qu'il était "doué d'une
intelligence assez remarquable et que les sciences et les
lettres avaient pour lui un attrait
invincible".
Formé intellectuellement
par des prêtres, pris entre un père ancien
volontaire de 1792 pour qui tous les hommes de la Grande
Révolution étaient des héros et une
mère très pieuse, pour qui ces mêmes
hommes étaient des scélérats, Pierre
Lefranc sort de cette éducation première
envahi par le doute et une incertitude qui
l'accompagneront longtemps. Homme mûr, il se
rangera, idéologiquement parlant, du
côté de l'ancien volontaire de 1792. Au plan
religieux et notamment au crépuscule de sa vie, sa
vieille éducation judéo-chrétienne
le fléchira sans pour autant totalement triompher.
Ce sera une des dualités de sa vie,
peut-être la plus importante.
Enfant de faible complexion, le
jeune Pierre est plus attiré par les livres que
par le rude métier de paysan. Toutefois,
jusqu'à 16 ans, sa vie s'écoule entre les
travaux des champs et l'étude de son père
où il fait toutes les écritures. Lorsque
l'âge se faisant sentir, celui-ci abandonne, en
1831, sa charge d'huissier, Pierre, alors
âgé de 16 ans, part à Dole où
il s'emploie comme clerc chez un important avoué
de la ville, Me Bey. Pierre y reste jusqu'à un
jour de l'année 1835. Il rentre alors chez un
notaire de Dole, Me Adeleine, en qualité de
premier clerc. C'est à ce moment qu'il commettra
quelques excès qu'on lui reprochera plus tard et
qui en mai ou juin 1937 lui ferment les portes de son
travail.
Cette année-là,
Lefranc quitte Dole et gagne Besançon, puis
Morteau, dans le Doubs. Vraisemblablement par
l'intermédiaire d'un inspecteur d'assurances de
ses amis, il est embauché comme agent à la
Compagnie de l'Union.
Fin 1838, début 1839,
à 24 ans, la tête pleine de projets et les
poches probablement remplies de poèmes dans la
veine de Béranger, un petit Franc-Comtois
nommé Pierre Lefranc s'en va à la
conquête de Paris.
Dans la capitale, très
rapidement il contacte le célèbre
chansonnier. D'abord épistolaires, leurs relations
se transforment à partir de 1844 en une solide
amitié. Des relations tissées autour d'un
goût commun pour la poésie et les chansons,
nourries de l'admiration de Lefranc et de l'affection du
"sage de Passy", des liens qui ne se distendront pas avec
la mort de Béranger et qui entrera dès lors
dans le panthéon de Pierre Lefranc.
Le jeune franc-comtois publie
son premier article dans la livraison du 10 octobre 1844
de la Revue Indépendante sous le pseudonyme
de Jacques Bonhomme; un clin d'oeil à ses origines
de français moyen. A cette époque Lefranc
est toujours employé à l'Union, non plus
comme démarcheur mais dans les bureaux de la
société. Cette première
collaboration du jeune homme à la revue de Georges
Sand suit de près l'amitié qui vient de
s'instaurer entre lui et le "poète national". Une
coïncidence qui, pensons-nous, ne fut pas fortuite,
eu égard aux très bonnes relations qui
existaient entre Béranger, Leroux et l'auteur de
"Consuélo".
Des premiers articles de Pierre
Lefranc dans la Revue Indépendante, le
poète se montre très satisfait.
à
suivre...
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