Il est rare que dans ces pages vouées
à l'information objective de mon village, que nous
"revêtions" le ton lyrique, celui qui selon mes
maîtres, est celui de la personne "je" et qui sert
à exprimer les sentiments.
L'événement du jour m'en
évoque deux autres, que j'ai connus lors de mon
passage à Moissey, mais qui, bien sûr,
ne sont pas les seuls.
L'hommage que je présente à l'une
d'entre nous se partage avec les deux
autres.
L'une des deux autres est Madame
Paulette Bouvier,
boulangère-cafetière de 1963 à 1988,
place de la Fontaine, et l'autre des deux autres est
Madame
Janine Jallon, qui a tenu
l'épicerie Cedis, en face de la statue de Sainte
Anne au jardin du presbytère, de de 1963 à
1988.
Avec Françoise
Thirion, ces commerçantes ont eu
en commun, en plus de leur goût du commerce,
l'amour de leur clientèle. Chacune a laissé
en chacun le souvenir d'une personne très ouverte
sur la société de son temps et en
particulier, sur la population locale.
Mais aujourd'hui, c'est Françoise Thirion
qui est l'objet de mon propos, puisque Françoise
vient de remettre son commerce d'épicerie "de
dépannage" comme elle dit, à Xavier
Cibil, maître de sa boulangerie,
toujours place de la Fontaine.
Françoise Gay est née à Bay
sur Aube, le 28 février 1948 de sa mère
commerçante et de son père garde forestier.
L'accouchement s'est très bien passé.
En tout cas, elle déclare ne pas en garder un
mauvais souvenir.
Beaucoup plus tard, après qu'elle ait
appris à marcher, puis "à parler", elle
rencontre à l'usine plastique de Langres son futur
mari, lui, natif de la Meuse. C'est pour des raisons
professionnelles que le couple arrive à l'UMD
(Usine Métallurgique Doloise) en
1967.
Après quoi naîtront Nathalie en 1968
et Frédéric en 1970.
C'est au cours d'une randonnée cycliste que
Gérard Thirion jette son dévolu sur le
village de Moissey, il s'y installe en 1979 en
construisant sa maison.
Françoise, après avoir
élevé ses enfants, Françoise qui est
mordue de commerce et de relations sociales, ouvre son
commerce d'épices et produits exotiques au
marché de Dole de 1985 à 1988. Ce commerce
est dur pour une femme, manutention, transports,
journées longues, soucis en quantité, elle
finit par se mettre au vert.
L'opportunité rêvée s'offre
à elle, sous le mandat du maire Bernard
Chauvin, à la succession de
Christelle Barbier, qui remet l'épicerie de la
place en 1997. C'est là qu'officiera
Françoise, avec son époux jamais bien loin,
jusqu'en 2011, heure non pas de la retraite, mais surtout
heure d'une belle opportunité avec la candidature
à la reprise de Xavier Cibil, qui rêve
d'épicerie en plus de boulangerie, au
moins.
Pendant 14 longues années, Françoise
sera au four et au moulin, approvisionnera, tiendra
boutique, livrera tant au foyer-logement que dans les
villages voisins, par tous les chemins et par tous les
temps, franchissant les montagnes, traversant les
rivières, longeant les précipices, bravant
les trombes d'eau, pénétrant les
tempêtes, s'enfonçant dans la nuit, ne
prenant que rarement du repos.
Et c'est d'ailleurs pour accéder enfin au
repos qu'elle quittera son commerce deux ans avant
l'âge dit de la retraite. Peu de congés,
exceptée la fermeture annuelle, ouverture
quotidienne sauf le jeudi, présence le samedi
entier et le dimanche matin et ceci 12 mois par
an.
Pendant 14 ans, le préau de sa boutique
sera le haut lieu de la parole villageoise, accueillant
les personnes en besoin de communication, où elle
sera continuellement, optimistement serviablement et
souriamment, une oreille attentive aux misères de
chacun.
Le 1er décembre 2011, après
l'inventaire, Françoise Thirion s'éloigne
du métier, de ceux qui l'aimaient, de ceux qu'elle
aimait, pour enfin se consacrer à sa famille, en
particulier à ses 5 petits-enfants et se consacrer
à elle-même, elle qui aime les sorties et
surtout, raffole de spectacles
théâtraux.
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