Aristophane qui ne s'appelait
pas Stéphane car ces gens-là avaient comme
post-nom "fils de "... est né du côté
d'Athènes vers moins 445 et serait mort autour de
moins 386. Sur 44 comédies qu'il aurait
écrites, seulement 11 nous seraient parvenues
entières, mais toutes traitent de la même
question: le monde tel qu'il est ne convient pas à
Monsieur Aristophane, alors il fait jouer des
pièces, où en dénonçant le
pouvoir, la corruption, la servilité, la
propriété, il rêve d'apporter sa
contribution à un monde mieux fait.
L'histoire nous
révèle qu'il aurait appartenu à la
"démocratie rurale", ennemie de la
"démagogie urbaine", au moment de la guerre du
Péloponnèse.
La pièce
"l'assemblée des femmes", écrite il y deux
millénaires et demi est un reportage-fiction sur
ce que serait la société dont les femmes
auraient pris le pouvoir, et pas en douceur, on s'en
doute, en calquant leur attitude sur ce qu'elles croient
avoir subi du pouvoir lorsqu'il était masculin.
Naturellement, tout cela serait trop beau puisque
Monsieur Aristophane, qui n'est pas que misogyne,
dénonce un peu plus loin l'empreinte de
l'hystérie sur la plupart des comportements
féminins (hystéra en grec = utérus
en latin) et le pouvoir au féminin aurait toutes
les chances de réussir à condition que ce
ne soit pas des femmes...
Le sujet de la pièce est
intéressant, car affreusement actuel et la
présentation par la troupe du
Caméléon est elle aussi
intéressante. On nous montre d'abord des femelles
qui glapissent comme des renardes*, ce à quoi tout
le monde dans le public n'est pas forcément
préparé. La pièce, que je ne raconte
pas, nous apporte ensuite des portraits bien
caricaturés d'hommes qui sont pleins de bonne
volonté, et qui ont le sentiment confus que
ça ne va pas aller; il y a même en prime, le
portrait du pleutre qui explique bien qu'il va essayer
"d'indexer" sa conduite sur celle du plus grand nombre.
En passant, l'auteur nous promène dans les
délices de la collectivisation de tous les biens,
incluant même celle des charmes masculins. Il n'y a
donc, au cours de ces 90 minutes de spectacle, pas
matière à s'ennnuyer.
Bien sûr, la troupe et
son metteur en scène ont pris des libertés
pour pouvoir jouer avec leurs propres armes: mais, comme
à l'époque d'Athènes, les
comédiens restent visibles, se font maquiller sans
se cacher, l'idée de choeur a été
conservée avec un petit groupe de 5
comédiennes qui occupent l'espace comme une seule
femme. Elles font flèche de tout bois car en plus
des cris et des hurlements, elles ont d'autres cordes
à leurs arcs: elles dansent, un peu, mais elles
chantent beaucoup et même, elles chantent bien (et
beau). Le Caméléon a donc rajouté
à son interprétation une couche sonore de
toute beauté, une bande son faite in vivo, un
guitariste dont on voit que c'est le métier, et
deux comédiennes qui nous poussent des paroles
nouvelles et éloquentes sur des airs connus, et
dont en comprend aussi clairement qu'elles ont
étudié le chant, mais pas seulement
à la chorale communale.
Cette pièce semble avoir
plu à beaucoup de gens, puisqu'elle a
été jouée sous cette forme à
Pesmes, à Châtenois, à Rainans et
enfin à Moissey, ce qui explique qu'elle n'ait pas
fait salle comble à Moissey. Mais peu importe, il
n'y a toujours pas besoin de remplir le Zénith
pour être bons.
* on parle bien ici des
personnages et non pas des
comédiennes.
|
La pièce a
été servie, et bien servie, par Mohamed
Bouarfa, Catherine Chandon, Hélène
Charbonnier, Jean-Jacques Dorier, Françoise
Mourlevat, Béatrice Rougy,
Jacques
Roux, Aline Sweczyk. Mise en
scène de Benoît Humbert.
|