village de moissey

souvenirs de Jeanne Martin (°1934)

compagne d'Edmond Jeannin

 Jeanne Martin est née le 1er novembre 1934 à Foucherans,

- de Ernest Martin (Moissey 1884-1956), employé au Centre Psychothérapique de Saint-Ylie et

- d'Alphonsine Duclos (née en 1894 et décédée en 1970).

Elle a passé son Certificat d'Etudes à 13 ans, l'âge normal pour cette époque puis est restée à la maison jusqu'à 19 ans, âge auquel elle est entrée, par concours, comme élève-infirmière au même hôpital que son papa. Après deux ans de formation, elle a travaillé au CHS jusqu'en 1989, heure de sa retraite.

Toute sa vie, elle a eu des attaches régulières et fréquentes avec le village de Moissey qu'elle a toujours considéré comme sien, et où elle coule paisiblement sa retraite (maison de famille AB 219).

 

Le lavoir des Gorges.

C'était l'endroit de la lessive par excellence. Bien que vivant dans la rue haute avec ma tante Léontine (Martin, veuve de Félix Gaudot, née à Moissey en 1886), après les années 1945, nous nous rendions au lavoir des gorges:

L'eau y était très douce, on savonnait sur place, car c'est une eau fine et souple, ça allait tout seul. On emportait tout le couleur sec, sur la brouette, et on emportait le bouilli pour le rincer. On mettait notre banc et on lavait à genoux, c'était très agréable.

On allait rincer la laine de nos moutons au fil de l'eau.

On lavait les draps, il y avait des pierres bien arrangées. Le lavoir, c'était un trou d'eau assez profond sur le ruisseau des Gorges, un endroit plus profond qu'ailleurs, ça allait très bien pour laver les draps.

Beaucoup de personnes s'y retrouvaient, mais la tante Léontine, elle choisissait pour y aller de préférence un moment où il n'y aurait personne, car elle n'aimait pas montrer ce qu'elle lavait, une pudeur quoi.

[Le mari de tante Léontine, Félix Gaudot qui est décédé en 1941, confectionnait des paniers].

 

La guerre de 1939-1945.

Avec mes parents, nous habitions Foucherans. Les officiers allemands se tenaient, sous l'occupation, au Château de Foucherans (appelé le Château Audemard, du nom de l'industriel connu pour les objets de fonderie Audemard-Guyon), et à Moissey, les responsables occupaient le Château Masson (la Maison Malet, AB 175), en face de la route des Prés d'Amont.

Avec mon papa, on venait régulièrement s'approvisionner à Moissey où nous trouvions tout ce que nous n'avions pas. On venait à bicyclette avec une petite remorque accrochée derrière. On venait aux pommes de terre, aux œufs. On avait un champ après le cimetière, des acacias, une vigne à Roche, avec des pêchers énormes (ces corbeilles de pêches rentrées sur la brouette!). Nous avions un autre champ derrière chez Marcel Daudy que Marcel lui-même cultivait.

En montant à Offlanges, on allait aux pommes de terre et aux betteraves, aux haricots, aux carottes; la salade poussait mieux qu'au jardin trop ombragé; (en ce temps-là le jardin ressemblait à un jardin de presbytère, avec lierre et pierres moussues).On mettait notre bouteille à rafraîchir à la prise d'eau, attachée avec un ficelle, car là-bas, il n'y avait pas d'ombre. [Cette prise d'eau est celle qui alimentait Montmirey-le-Château et Moissey avant le Syndicat des Eaux, à raison de un tiers pour Moissey et deux tiers pour Montmirey. Cette prise recevait de l'eau d'un champ de l'autre côté de la petite route qui fait Offlanges-Les Carrières d'Eurite].

On allait aux betteraves pour nos animaux, puisqu'on avait des poules, des lapins, des moutons à l'écurie ou en champ. On avait même un bois au Pré des Veaux, que j'ai donné -bien plus tard- à un voisin. A Foucherans, pas de culture, que des tickets...

Entre les années 1957 et 1963, l'eau est arrivée sur les éviers. Avant, on allait à la fontaine au coin de chez Virgile Ruisseaux, on prenait l'eau dans des seaux, et il y avait un grand abreuvoir qui accueillait les vaches et les chevaux.

Cet abreuvoir a dû être déposé au moment de l'installation des égouts dans la rue haute, c'est-à-dire entre 1968 et 1972, je crois. Les toilettes, c'était une "guérite" dans le jardin : sous la planche à trou, où s'asseyait l'utilisateur, il y avait un baquet à oreilles, qui était amovible et qui était régulièrement vidé dans le jardin.

 

La famille.

Le papa de mon cousin Paul-Edmond, était clerc de notaire chez Maître Besson, qui habitait la belle maison (AB 266) qui est devenue une belle école aux environs de 1957, sous le ministère du maire Maurice Besson, le neveu du notaire. Cet immeuble a aussi accueilli un temps, Monsieur Téliet qui était directeur de la Carrière d'Eurite.

Après avoir été clerc de notaire, il devenu militaire et a servi au Tonkin. Il est décédé en 1913 à l'âge de 42 ans. C'est lui a acheté la maison que j'occupe et lui aussi qui a ramené de là-bas ces meubles très particuliers, d'une essence qui n'existe plus aujourd'hui, le Vina Tichotchine.

 

Le village.

J'ai toujours aimé Moissey, je ne vois que par Moissey, c'est si beau, c'est si vert, si vallonné. Quand j'étais petite, en vacances chez la Léontine, j'adorais me rendre dans la rue du Château d'Eau, celle qui monte à la Craie. Je cueillais des ancolies de toutes les couleurs, des violettes, des marguerites, des puces, ces herbes qui grelottent tout le temps. Moissey, c'est mon pays.

 

Les Carrières.

Ce que je sais des carrières, c'est pas grand chose. Je vois la bâtiment au bord de la route avec ses godets. Je sais qu'on extrait à Moissey une pierre très très dure qu'on utilise pour faire les routes et les allées. A Foucherans, on a beaucoup utilisé le gravier de Moissey dans les allées de jardins et les bétons au sol, les chappes. Bien que ce matériau n'eût pas vocation à entrer dans le mortier, j'ai connu des gens que ça ne gênait pas.

 

Madame Hélène Jeannin, (maison AB 402).

Elle était veuve, j'ai connu son fils célibataire qui chantait si bien. Hélène partait en journées, laver le linge, piocher ou rentrer des betteraves, vendanger. Elle aimait danser avec un bon danseur, elle me parlait d'un autre fils Georges, marié qui était dans la gendarmerie, à Salins je crois.

Hélène avait peu de ressources. Jusqu'à sa mort, je l'ai vu fermer sa porte à clef et partir "en journées". En arrivant le soir, elle allumait du feu, il faisait froid chez elle. Sa cuisine était sombre, avec cette porte pleine. Sa chambre était plus gaie, elle avait une fenêtre qui donnait sur le jardin de Maurice Besson. Des lits, un en bois, un en fer, avec des matelas de plume et de gros édredons.

Les souris vivaient à l'aise, notre présence ne les dérangeait pas.

Hélène, souvent morose, s'habillait avec des vêtements gris ou noirs, coiffée d'un petit chignon serré, la silhouette voûtée.

 

La poésie.

Jeanne Martin, qui a une plume fraîche et spontanée, ne manque jamais de chanter les événements de la vie, l'affection pour son prochain ou la beauté de son village, dans un recueil de poèmes simples et colorés qu'elle réserve habituellement aux gens qu'elle aime.

moissey, le samedi 6 juillet 1996.

 

Moissey.

Un village jurassien
Les feuilles s'ébattent à l'aise
Tout proche d'une forêt
La brise les détend
Trésor d'un magicien
Les senteurs se complaisent
Joyau aux mille reflets
A parfumer le vent

Dans ses sentiers paisibles
Beauté majestueuse
Bordés de fines fleurs
Pour toutes les saisons
Flâner vous est possible
Ces images merveilleuses
A n'importe quelle heure
S'étalent à l'horizon

Les images des collines
Touristes d'un été
Habillées de verdure
Visitez simplement
Ressemblent aux crinolines
Et vous découvrirez
Gracieuses en leur parure
Le passé, au présent

Si l'angélus sonne
Le clocher qui abrite
Et que l'écho le suit
Une vie, un contenu
Il ne dérange personne
Attend votre visite
Égayant l'aujourd'hui
Voyageurs inconnus

Les papillons se posent
Noblesse d'un paysage
Sur les épis gonflés
Ses buissons, ses atours
L'oiseau chantant dispose
Sa robe n'a pas d'âge
De mets frais et variés
Elle plaît depuis toujours.

Jeanne Martin.

La porte d'Hélène Jeannin.

dessin de Jeanne Martin.

«Je l'ai vu fermer sa porte à clef et partir "en journées". En arrivant le soir, elle allumait du feu, il faisait froid chez elle. Sa cuisine était sombre, avec cette porte pleine.»

Jeanne Martin à Moissey [année 1958]

Jeanne Martin à Moissey [année 1958]

Jeanne Martin à Moissey [année 1968]

Paul-Edmond Jeannin à Moissey [année 1968]

Jeanne Martin et Paul à Moissey [année 1968], photos de famille.

autour de Jeanne Martin
évocation de Jeanne Zocchetti, 2010
fête du sport au foyer logement, 2007
un petit poème sur Moissey, 1997
souvenirs de Jeanne Martin, 1996
Jeanne au théâtre du foyer rural, en 1989
Jeanne au théâtre du foyer rural, 1988
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