autour de Moissey, à Amange

le sentier du loup-garou

La fête du Loup-Garou, à Amange, en nocturne.

extrait de JURA MAGAZINE (Juin 1998).

Texte : de Yvon Amiot et Daniel Bernardin.

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L'itinéraire pour randonneurs, curieux, historiens, citoyens...

BIENVENUE SUR LE SENTIER DU LOUP-GAROU

Hier, au XVI e siècle, l'heure est grave. Les villageois de "La vallée des Anges" sont victimes d'une cruelle et énigmatique créature. Animal, être humain, ou les deux ?

La réponse se trouve, aujourd'hui à Amange, sur le sentier pédestre du "Loup-garou". Une véritable promenade à travers le temps, le village d'Amange et la forêt de la Serre.

"...Sur l'avertissement fait à la cour souveraine du Parlement de Dole, que ès territoires d'Amange, Vriange, Châtenois, Romange et villages circonvoisins, se rencontroit souvent depuis quelques temps un Loup-garou, comme on dit, lequel avait déjà pris et ravi plusieurs petits enfants sans que depuis ils aient été revus vivants : ladite Cour, désirant obvier à de plus grands inconvénients, a permis aux manants et habitants des lieux, nonobstant les Édits concernant la chasse, de pouvoir s'assembler avec épieux, hallebardes, piques, harquebuses et austres bâstons, pour chasser et poursuivre ledit Loup-garou où ils le pourront trouver, et le prendre et occire sans encourir aucune peine et amende..."

En cet automne 1573, période de très grande famine, l'anthropophagie gagne les campagnes. Les délits et méfaits commis entre septembre et décembre en ce petit coin de Jura niché à l'abri du massif de la Serre en sont malheureusement un triste exemple; les villageois de cette région, qui répond pourtant au doux nom de "Vallée des Anges", sont terrorisés par des crimes d'enfants retrouvés déchiquetés et bestialement dévorés. Les atrocités doivent cesser. Suite à cette autorisation du parlement Dolois s'ouvre la grande chasse au Loup-garou.

Vue aérienne d'Amange.

La fête du Loup-garou, à Amange, en journée.

C'EST LA FÊTE DU LOUP GAROU

Le sentier du Loup-garou fut officiellement inauguré le 13 juillet 1997. A cette occasion, l'association "Amange Animation" propose de jumeler le sentier à une grande parade annuelle. La fête du Loup-garou est née ! Le but de cette journée est de pérenniser le sentier pédestre et recréer théâtralement les dernières heures du Loup-garou d'Amange. Après l'avoir chassé sur le sentier balisé. Le loup est fait prisonnier au château du village. La nuit tombée, à l'issue d'une grande retraite aux flambeaux, les villageois traînent le Loup-garou jusqu'à la place centrale où se dresse le bûcher. Là, il est jugé pour ses crimes infâmes et brûlé; De nombreuses animations, notamment pour les enfants, viennent agrémenter cette journée. Un grand bal populaire clôture les festivités.

La fête du Loup-garou aura lieu cette année le 14 juillet. La grande chasse au loup débutera vers 15 heures. Cette année, André Besson sera là pour dédicacer, entre autres son ouvrage "Le Loup-garou de la Vallée des Anges". L'illustrateur de ce livre, Thierry Gaufillet de Pontivy, exposera ses oeuvres.

Le Loup-garou attaque, fin septembre, au lieu-dit des gorges entre Amange et Châtenois une fillette d'une dizaine d'années et après "l'avoir occise tant avec ses mains et dents... l'avoir dépoillée et mangé portion de la chair de ses cuysses et bras et non content en avoir porté portion à sa femme".

Quelques deux mois plus tard, c'est le bois de la Ruppe, entre Authume et Châtenois, qui sera le décor de l'enlèvement d'une nouvelle fillette "qu'il étrangla et meurtri de cinq playes avec ses mains en intention de la manger".

A peine quelques jours s'écoulent et ce qui sera son dernier délit concerne "un enfant masle de dix ans entre Gredisans et Menotey en une vigne et avoir mangé de la chair des cuysses, des jambes et ventre".

La fréquence des délits s'accélère, le périmètre d'intervention se réduit. Sans nul doute, le Loup-garou est là, proche des villages, dans la forêt de la Serre. Très vite les soupçons se portent sur Gilles Garnier qui vit là, avec sa famille, à l'ermitage Saint-Bonnot distant d'à peine quelques centaines de mètres du village d'Amange. Les suspicions sont trop fortes. Sans qu'il fût surpris, en flagrant délit, Gilles Garnier est arrêté fin décembre dans sa vieille maison de Saint-Bonnot et conduit à Dole où, s'il est reconnu coupable, il sera jugé. Gilles Garnier avouera rapidement tous les faits, même des délits antérieurs et similaires, notamment le jour de la Saint Barthélemy, un vendredi !

La cour souveraine de Dole rendit son verdict le 18 janvier 1574 "l'an mil cinq cent soixante quatorze. En cause de messire Héry Camus, docteur en doit, conseiller du Roi notre Sire, en sa cour souveraine du parlement de Dole, et son Procureur général demandeur en matière d'homicide sur les personnes de plusieurs enfants, dévorement de leur chair sous forme de Loup-garou et autres crimes et délits, d'une part. Et d'autre part, Gilles Garnier, défendeur, natif de Lyon, détenu prisonnier en la conciergerie de Dole; Ledit défendeur étant ermite près d'Amange, et n'avant pas de quoi sustenter sa famille, tomba en sorcellerie. Ainsi, étant en forme de Loup-garou, ledit défendeur Gilles Garnier prit de nombreux enfants d'environ six à douze ans et les tua et occis tant avec ses mains semblant pattes qu'avec ses dents. la cour condamne Gilles Garnier, par arrêt, à être aujourd'hui conduit et traîné à l'envers sur une claie par le Maître exécuteur de la haute justice, depuis la conciergerie jusqu'au tertre de ce lieu, et y être brûlé tout vif, et son corps réduit en cendres, le condamnant en outre aux dépens et frais de justice. Donné et prononcé judiciairement à Dole en ladite Cour, le dix-huitième jour du mois de janvier l'an mil cinq cent soixante quatorze".

Daniel Bernardin, l'artisan de nombreuses victoires.

NAISSANCE D'UN SENTIER

Il y a bien longtemps que le Loup-garou ne hante plus les villages de la "Vallée des Anges". A Amange, Loup-garou est aujourd'hui synonyme de balade, de découverte, de plaisir et de nature à travers le sentier qui porte son nom. Un groupe d'adolescents du village, sans même s'en douter, sera à l'origine de cette originale entreprise. Au printemps 96, ces ados sollicitent le conseil municipal afin d'obtenir l'autorisation de "taguer" un long mur disgracieux qui longe la maison familiale d'Amange. la commission patrimoine de la municipalité ne rejette pas cette proposition et demande conseil à un artiste peintre quant aux possibilités de mise en valeur picturale du mur concerné; L'idée d'une grande fresque ayant trait au patrimoine du village et de la Serre est retenue. la maison familiale donne son accord pour l'utilisation du mur, les jeunes se mettent au travail avec pour objectif de terminer cette réalisation à l'été 97. Parallèlement à ce projet, un club patrimoine, animé par Daniel Bernardin l'instituteur du village, a recensé depuis dix ans une grande partie du patrimoine d'Amange. Pourquoi la grande fresque ne serait-elle pas une des étapes d'un sentier pédestre balisé et jalonné de divers panneaux expliquant au grand public le riche et hétéroclite patrimoine local ? La municipalité donne son feu vert.

Les demandes de subventions et de sponsoring reçoivent des réponses favorables. L'association "Serre Vivante" et Luc Jaccottey, archéologue de la région, se proposent d'approfondir les recherches, de réaliser les panneaux et de les installer. Voilà une affaire qui... marche ! Aussi bien sur la fresque que sur les panneaux explicatifs. le Loup-garou semble être le thème le plus fort. C'est donc tout naturellement que l'on baptise cette réalisation "le sentier du Loup-garou".

La main de Françoise Bernardin, peintresse amateur, en train de "faire" les cascades de la Vèze d'Amange, sur le sentier du Loup-Garou.

La justice au service du droit, déjà...

SUR LES TRACES DU LOUP-GAROU

Les premiers jours de juillet 97, comme convenu, tout est en place. La réalisation est remarquable. La nature et l'environnement, la culture et le patrimoine y font bon ménage. Les 22 panneaux, harmonieusement répartis entre village et forêt sont de véritables mines d'information. On se laisse prendre au jeu du savoir, ce patrimoine local nous passionne tant !

Tout au long des 4 km du circuit, on se laisse transporter de découvertes en découvertes. Des bâtisses insolites du village à l'ermitage Saint Bonnot, qui fut le repère du Loup-garou, en passant par un vieux moulin, des cascades, un étang (pour le pique-nique c'est l'idéal)... sans oublier d'apprécier le calme et la beauté du site. la durée de cette randonnée (il est important d'être bien chaussé) est d'environ une heure et demie.

LA GRANDE FRESQUE MURALE

La fresque murale, reste un des éléments majeurs du sentier. Tous les tableaux ont été réalisés sous la responsabilité et les conseils d'Yves Robé, artiste-peintre à Audelange. Les adolescents du village nous invitent à découvrir l'habitat préhistorique des lieux; Les ruines d'un camp néolithique, environ - 2000 avant J.-C. subsistent dans la forêt de la Serre. Sur un second tableau, ils mettent en valeur l'architecture locale. une légende permet de localiser les différentes bâtisses dans le village. les trois panneaux suivants sont réalisés par les enfants du club patrimoine et les élèves de l'école primaire qui viennent d'Audelange, Châtenois et Amange. Ils mettent en action le Loup-garou de "La Vallée des Anges" à travers ses méfaits, son arrestation et son exécution. Le dernier tableau est l'oeuvre des élèves de la Maison familiale et rurale, il représente l'occupation sylvicole et agricole du territoire.

Le procès en sorcellerie du Loup-garou.

UN CHANTIER JEUNES A AMANGE EN 1998

La commune et l'intercommunalité "Le Jura entre Serre et Chaux", souhaitent continuer le travail d'aménagement du sentier pédestre du Loup-garou. Le travail portera sur la mise en valeur de l'ermitage St-Bonnot situé sur le sentier. Sous la responsabilité d'un spécialiste, les volontaires matérialiseront l'empire au sol du bâtiment, après avoir débroussaillé et dégagé les parties éboulées. Les niveaux archéologiques ne seront pas touchés par ces travaux; le but est de rendre visible et compréhensible la forme originelle du bâtiment.

Parallèlement, les volontaires aménageront les abords du sentier du Loup-garou et travailleront au débroussaillage et balisage des sentiers reliant les différents villages de l'intercommunalité.

Ce chantier, qui aura lieu du 4 au 25 juillet, regroupera une quinzaine de personnes, d'une moyenne d'âge de 22 ans et de 6 à 8 nationalités différentes.

Le feu final, engloutissant le coupable.

(ARTICLE PARU DANS LE PROGRES LE 8 AOÛT 1998)

Auteur, Bernard Cercey

LE SENTIER DU LOUP-GAROU A AMANGE

Il y a bien longtemps que le loup-garou ne hante plus la forêt.

Le mot est aujourd'hui synonyme d'une passionnante promenade

à travers le temps, le village et la Serre.

Depuis une dizaine d'années, un club "Patrimoine", animé par Daniel Bernardin, directeur de l'école, avait recensé les "vieilles pierres" locales.

Après un minutieux travail de recherche conduit par Luc Jaccottey, archéologue à Taxenne, 22 panneaux explicatifs aux textes abondamment documentés, placés sur un socle métallique et préservés des intempéries, jalonnent un circuit à travers le village et la forêt voisine.

Premier arrêt à la grande fresque réalisée sur le mur de la Maison familiale par les adolescents et les enfants de la commune sous la direction de l'artiste-peintre Yves Robé. Elle représente les ruines d'un camp néolithique (62 000 ans avant Jésus-Christ) ou l'occupation agricole du territoire. Mais surtout, elle évoque la légende du loup-garou, qui a marqué l'imagination des jeunes, à travers ses méfaits, son arrestation et son exécution... et donne son nom au sentier.

Toute l'histoire du village revit ensuite sous les yeux du visiteur : les anciens commerces, les châteaux (le premier date du 18 e siècle, alors que le second, plus ancien puisque datant du Moyen Age, est encastré dans une maison du 19 e), le four banal, l'école et son passé, les bains-douches, la fontaine-lavoir, le presbytère...

 

EN PLEINE NATURE

Puis le sentier se glisse en pleine nature vers la Serre, où les panneaux judicieusement placés portent des titres évocateurs : légendes (la guerre des anges, une âme en peine...) ; "faune" et "flore" présentent les espèces que l'on peut rencontrer, celles qui affectionnent le calcaire et celles typiques des sols granitiques, car, comme l'explique "géologie", le massif de la Serre est le seul dans ce cas en Franche-comté "Préhistoire", rappelle qu'un étonnant abri préhistorique, constitué par un bloc de granit effondré, a servi de pause à un groupe de chasseurs, comme en témoignent les pointes de silex retrouvées là.

Alors que les abords de l'étang invitent au pique-nique "hydrologie" expose tout le circuit hydraulique depuis la source de la Vèze jusqu'à son confluent avec le Doubs. Les ruines du moulin à eau du 18 e rappellent le temps où le village vivait en antarcie. on fait connaissance avec la forêt, son historique et ses trois essences principales ; le vignoble (une époque révolue). "Panorama" détaille la superbe vue sur la plaine du Doubs, la forêt de Chaux et le mont Poupet; Reposante après les ruines de l'ermitage Saint-Bonnot, dont l'emprise est aujourd'hui matérialisée, où rode l'ombre du sinistre Loup-garou.

 

LA LEGENDE

Automne 1573. Alors que règne une terrible famine, les villages de la "Vallée des Anges" sont terrorisés par des crimes atroces commis sur des enfants retrouvés déchiquetés et bestialement dévorés.

Suite à une autorisation du Parlement dolois de "s'assembler avec épeix, hallebardes, piques, harquebuses et autres bastons", les soupçons se portent sur Gilles Garnier, un marginal dirait-on aujourd'hui, qui vit avec sa femme en pleine forêt à l'ermitage Saint-Bonnot.

Celui-ci est conduit par un groupe d'habitants au tribunal de Dole. Après les aveux de Gilles Garnier, les minutes du tribunal du 18 janvier 1574 précisent le verdict : "Gilles Garnier, tombé en sorcellerie, ayant pris et occis plusieurs enfants de 6 à 12 ans tant avec ses mains semblant pattes qu'avec ses dents, la Cour le condamne à être aujourd'hui traîné à l'envers sur une claie depuis la conciergerie de Dole jusqu'au tertre de ce lieu et y être brûlé vif...".

 

LE SENTIER PRATIQUE

Départ du parking de la salle polyvalente d'Amange,

à 11 km de Dole en direction de Besançon.

A Rochefort-Sur-Nenon, prendre le D 76.

Circuit de 4 km, balisé en bleu clair

et par 22 panneaux explicatifs.

Durée : 1 h 30. Parcours sans difficulté.

Se munir de chaussures de marche par temps humide.

 

Il est recommandé de tenir les chiens en laisse,

de respecter la végétation et les animaux, d'éviter

d'emprunter le sentier dans sa partie forestière

en période de chasse (de septembre à janvier inclus),

les dimanches et jours fériés.

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