Le territoire du nord-ouest Jura porte la marque,
dans son patrimoine civil et religieux, des
différentes destinées qu'il a
traversées.
Ainsi, française au XIVe siècle, puis
réunie à la Bourgogne au XVe siècle,
notre région vivra son
âge d'or au XVIe siècle administrée
de loin par les Habsbourg d'Autriche puis par les
Habsbourg d'Espagne. La Comté revient à la
France au XVIIe siècle dans des conditions
terribles pour villes et campagnes, avant de
connaître enfin la paix et la
prospérité au XVIIIe siècle.
De manière générale, ces
secousses historiques n'ont pas favorisé un
épanouissement artistique durable avant le XVIIIe
siècle. En revanche cette proximité d'avec
le duché de Bourgogne a favorisé les
contacts avec les statuaires bourguignons des XVe et XVIe
siècles, en particulier l'on songe à
Auxonne ville frontalière active, qui fut
certainement le théâtre de commandes
conclues entre paroisses, donateurs et artistes. Les
statues de Peintre et celles de l'église de Brans
actuellement au Musée des Beaux-Arts de Dole
pourraient illustrer cette hypothèse.
Au XVIIe siècle la région est meurtrie
par la guerre de «dix ans». Durant cette
période de grandes peurs (invasions,
épidémies de peste), se multiplient les
oratoires à l'entrée des villages (Peintre,
1626, Rainans ). Après cette période de
destruction, débuta une période de
reconstruction d'églises, de fontaines. Le
clocher-porche se généralise comme à
Peintre, Pointre, Thervay.
Les dômes à l'impériale,
héritage des Habsbourg d'Autriche, se maintiennent
encore dans le nord Jura. Ainsi les clochers d'Offlanges,
de Mutigney, de Frasne-les-Meulières, comportent
tous un dôme à l'impériale
élevé au XVIIIe siècle. On peut,
selon l'abbé Jean-Christophe Demard, percevoir
dans cet engouement des villageois pour la forme à
l'impériale, une sorte de réaction
identitaire après l'annexion à la France.
Malheureusement beaucoup furent détruits à
la restauration. La toiture à l'Impériale
fut jugée lourde et supprimée au profit de
flèches néo-gothiques.
C'est peut-être la mésaventure qui
arriva au clocher de Chevigny, orné autour de 1775
d'un dôme à l'impériale et qui fut
remplacé par une flèche effilée. Il
n'est cependant pas impossible d'imaginer qu'à
nouveau un dôme à l'impériale puisse,
un jour, couronner le clocher de Chevigny...
influences
Durant ce XVIIIe siècle prospère les
artistes restèrent sur leur lieu d'origine et
purent concevoir des uvres originales. Ainsi
l'architecte Anatoile Amoudru introducteur de
l'architecture néo-classique à Dole et sa
région a marqué de son style bon nombre
d'églises, à commencer par l'église
de Chevigny, puis l'église de Peintre (chaire et
confessionnaux). De même le sculpteur
Claude-François Attiret a, sans doute,
donné des plans pour plusieurs fontaines
réalisées dans nos villages comme la
fontaine de Moissey, et peut-être la fontaine
située au pied du château de Mutigney. Le
célèbre architecte des Salines,
Claude-Nicolas Ledoux, imprégna par le
caractère novateur de ses projets, les architectes
de son temps. On pense à Mutigney et sa fontaine
aux trois bassins qui réutilise des détails
architecturaux de l'oeuvre de Ledoux.
Pourtant le véritable art-franc-comtois, en ce
XVIIIe siècle bâtisseur, est celui des
artisans du bois, maîtres d'uvres des
retables d'églises (Montmirey le Château,
Peintre, Offlanges, Dammartin
), des chaires et
confessionnaux, des boiseries et autres mobiliers
d'église, parfois savants, parfois naïfs et
populaires, mais toujours pleins de saveur.
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